Voilà maintenant deux mois que les choses ont basculés. La société dans laquelle Sam avait grandi, le monde qu'elle connaissait...tout ça n'était plus qu'un souvenir. Il y a quelques semaines encore, tout était normal, Sam avait quitté les montagnes de la froide Alaska pour revenir à Park City dans l'Utah afin de retrouver sa famille et passer quelques temps avec eux pendant ses vacances. A l'époque, Sam était encore guide de hautes montagnes, spécialisé dans l'escalade des plus hauts sommets de l'Amérique du Nord.

Ce n'était pas un travail comme les autres, son bureau était niché à des hauteurs avoisinant les 6000 mètres. Pas d'ascenseur pour arriver en haut...mais les efforts valaient le coup. Car la vue était magnifique et elle se sentait complètement libre. Et puis elle n'avait pas de patron derrière son dos pour lui dire ce qu'elle avait à faire. Les gens qu'elle amenait là-haut étaient des grimpeurs émérites et des plus sérieux, pas des espèces de riches dentistes qui voulaient simplement se payer un peu de frayeurs. L'entente entre les membres des équipes de grimpeurs, était totale. Mais c'était un métier dangereux et surtout très physique. Les vacances étaient donc une absolue nécessité, surtout depuis qu'elle s'était fracturé le bras à la suite d'une chute en Amérique du Sud.

Mais voilà, les vacances avaient été de courte durée. Car les choses se sont mises à se détériorer de plus en plus rapidement pour se terminer par le chaos que les citoyens américains connaissaient tous. Ça avait commencé par une rumeur...une simple vidéo sur internet qui était devenu virale. Tout le monde en ville s'était dit qu'il ne s'agissait que d'un montage -très bien fait- et puis ils étaient passés à autre chose. Sauf qu'un jour, les morts ne sont plus restés morts et quand Hubert, le voisin des Reed a commencé à manger sa femme, ça a été la débandade. Tout le monde c'est mis à paniquer, la ville c'est retrouvé à feu et à sang en moins de deux heures.

Sam avait été poussé dans la voiture de ses parents et ils lui avaient ordonné de partir le plus vite possible. Elle n'avait pas eu le choix et avait fuit. Cela faisait maintenant deux mois que Sam était sur les routes, mais sa voiture était bien derrière elle. Sam n'avait pas pu refaire de plein et avait été contrainte de continuer à pied. La belle avait réussi à survivre seule pendant tout ce temps. Elle avait appris à chasser lorsqu'elle était petite, à cueillir des baies, des plantes et des racines comestibles, à utiliser les cachettes naturelles ou bien squattait des maisons abandonnées. Tout ça, elle l'avait appris de son père, son grand-père et sa grand-mère. Ses pas l'avaient conduit jusque dans le Michigan.

Malheureusement, ses provisions avaient beaucoup diminué et il lui fallait absolument manger. Elle n'avait rien dans le ventre depuis des jours, seulement de l'eau et la belle sentait la faiblesse la gagner. Or, être faible n'était plus permis à présent. C'était vivre ou mourir. Et Sammy ne voulait pas mourir. Alors elle cherchait partout pour voir s'il y avait de quoi se nourrir. La soirée était en train de tomber et Sam était plus que jamais sur ses gardes. Elle était actuellement dans un petit village qui était désert, peut-être trouverait-elle quelque chose ici, qui aurait été épargné par les pillages? Sam avançait prudemment, elle ne voulait absolument pas tomber sur des zombies. Elle commença par visiter une première maison puis une deuxième, elle ne trouva qu'un pain de savon et des haricots secs. Alors elle en visita une autre, puis une autre...jusqu'à ce qu'elle entende un bruit suspect. Il y avait un zombie dans le coin, tout près d'elle.

Ne voulant pas risquer sa peau inutilement, la jeune femme partie dans la direction opposée au bruit. Il lui fallait trouver une cachette au plus vite, car il faisait bientôt nuit noire, de plus, la température se rafraîchissait beaucoup. Courant un peu au hasard, elle tomba sur un camping-car qui semblait abandonné. Un peu impatiente, la jeune femme ne pris pas les précautions d'usage et tira comme une dingue sur la poignée pour espérer se mettre à l'abri. La poignée finit par céder mais dans sa précipitation, la jeune femme ne vit pas le canon de l'arme à feu qui était pointé sur elle, elle n'entendit pas non le clicketie que fait un doigt pressant une gâchette et ne put que subir.

Une détonation, puis une douleur insoutenable à la hanche. Sam poussa un hurlement de douleur et s'étala de tout son long sur le sol poussiéreux. Sa hanche lui faisait atrocement mal et du sang maculait tout le bas de son corps. Les larmes lui montèrent aux yeux tandis qu'elle se traînait misérablement sur le sol pour essayer de récupérer son piolet qui avait volé quelques mètres plus loin. Le souffle court, elle plaqua une main sur sa blessure, essayant de faire une compression sur la plaie et de l'autre, elle serrait son piolet, affolée à l'idée qu'on ne l'attaque encore. Qui sait sur quel dingue elle était tombée!

Cela faisait maintenant 2 mois que Keegan Svelt Harington vivait dans son vieux camping-car. Il ignorait ce qui était arrivé à ce monde. Ne savant pas comment ça avait commencé, si c'était une rebellion, une maladie, une invasion.. Tout ce qu'il sait, c'est que depuis quelques temps, c'est vraiment le merdier dehors. Il est là, perdu au milieu de nulle part. Une vieille photo de sa famille en main, son regard épuisé se pose sur celui de sa mère, de son père aujourd'hui vivants, seulement, à travers cette photo. Cette unique photo retraçait sa vie entière faite de sourires hypocrites, de rires stupides, de manipulations incessantes et de parents honorables. Il se souvint alors de la journée du 27 mars 2014.

Ce jour-là était un jour comme les autres, avec une exception près, c'était le jour de son départ en Irak. Assis sur le rebord du lit, la tête ballante encore embrumée d'un profond sommeil, Keegan s'accordait quelques minutes de répit, certainement ses dernières, avant que la sonnerie de 8:30 ne retentisse. Comme à son habitude, il s'extirpait des draps, dévalait les marches d'escaliers une par une et se dirigeait vers la cuisine, mais cette fois-ci l'ambiance n'était pas à la rigolade. Sa mère essuya son maquillage qui était, à présent, détruit à cause des pleurs de la nuit, tout en esquissant un simple sourire forcé qui faisait apparaître ses rides et ses cernes.

- Bien dormi ? Il n'y a que..,elle se pencha vers le frigo puis vers la corbeille de fruits, des oranges..
Puis elle prit un ton gêné et plus froid
-  Je n'ai pas eu le temps d'aller faire les courses, je suis désolée Kee..
- T'inquiète pas, ça me va

il alla dans la réserve afin de boire un jus d'orange qu'il pressa lui-même. C'était bien mieux que les jus en bouteille pour les vitamines. Et des vitamines, il en avait besoin pour pour faire sa séance de sport. Oh non, il n'était pas comme Patrick Bateman, à être capable de faire mille pompes le matin, lui était beaucoup plus simple. Une heure, quatre fois par semaine – les lundis, mercredis, vendredis et dimanches – pendant laquelle il suivait, dans la pièce de la maison aménagée en salle de sport, la petite routine qu'il avait mis au point. Une routine à l'ancienne, qui ne nécessitait pas des masses de matériel. Vingt tractions et vingt dips, qu'il répétait trois fois, vingt pompes et vingt squats qu'il répétait six fois. De quoi tenir une quarantaine de minutes. Keegan consacrait les vingt dernière minutes à réaliser différents exercices pour travailler ses abdominaux. Après ça, la douche avait de suite des allures de bénédiction. Il ne restait plus qu'à finir sa toilette, enfiler sa tenue de soldat et passer sa dernière après-midi avec ses parents..

Interrompu par un bruit strident venant de la serrure, Keegan lâcha sa photo pour attraper son revolver 12 mm, de son holster dorsal d'un geste prévisible. Puis, il se releva difficilement de sa place en dévisageant l'extérieur, à travers la fenêtre de son camping-car. Etait-ce encore des abrutis qui cherchaient de la nourriture comme des vautours ? Des anciens militaires qui venaient le chercher ? Non c'était impossible, il n'avait vu presque personne depuis ses derniers mois.

Une fois la serrure défoncée, une silhouette apparut. Il positionna le canon de son arme tout en visant la hanche de la silhouette qui semblait de plus en plus claire. Puis, son index appuya sur la gâchette de l'arme machinalement.

Suite à cette détonation, il s'avança d'un pas méfiant jusqu'à la silhouette qui était en réalité une femme. Keegan devint encore plus pâle qu'il ne l'était, finissant par abaisser son arme. C'était la première fois qu'il n'achevait pas un survivant.Cette femme ressemblait grandement à sa mère quand elle était plus jeune. Une fois qu'elle se trainait à terre, il voulait l'aider. Mais pourquoi lui faire confiance alors qu'elle tenait un piolet et qu'elle était capable de le tuer à la moindre occasion ?

A chaque fois qu'il voulait prononcer un mot, sa gorge se noua directement à tel point qu'elle ne pouvait pas comprendre. Il détourna alors ses talons afin de se diriger jusqu'à son sac d'excursion. Sac d'excursion qui contenait des bandages. Sans vraiment faire attention à la jeune femme, Keegan chercha s'il y avait par ailleurs, une trousse de premiers secours. Mais il n'y avait rien. Rien de rien. Il finit par prononcer quelques mots d'un fort accent suédois

« Je suis désolé »

Sam avait été pas mal blessée dans sa courte existence, mais jamais elle n'avait ressenti une douleur aussi intense. Le moindre geste, la moindre tentative de mouvement manquait de la faire hurler de douleur. La jeune femme ne pouvait s'empêcher de penser que les gens étaient dingues de tirer d'abord et de causer ensuite! Mais...c'était sous le coup de la colère qu'elle disait ça, parce qu'elle même aurait appliqué la même méthode.

Le monde marchait sur la tête...entre les morts qui se relevaient de leur tombe et les vivants qui devenaient de vrais animaux, leur vie ne tenait qu'à un fil. Alors quoi de plus normal que de vouloir se défendre? Mais pour l'instant, pas question pour la jeune femme de reconnaître ses tords. Elle voyait par terre une flaque de sang s'échapper de son jean, à l'endroit où elle avait été touché. Elle retira quelques secondes la main qui faisait pression sur sa blessure mais une gerbe de sang s'échappait presque aussitôt de sa plaie. Sam était catastrophée...elle priait pour que l'artère fémorale ne soit pas touchée! Si c'était le cas, alors Sam pouvait rien creuser sa tombe. La mort dans ces cas-là, arrivait dans les 3 minutes qui suivaient.

Sam claqua des dents. Non pas qu'il faisait spécialement glacial cependant, la quantité de sang qu'elle perdait était important. Mais l'amérindienne n'était pas prête à lâcher prise, surtout qu'à présent, l'auteur du tir était devant elle...sans doute allait-il l'achever maintenant! La jeune femme avait du mal à distinguer ses traits dans la pénombre de la nuit qui s'installait. Sans doute un homme à en juger par la lourdeur de son pas et la carrure. Son coeur battait la chamade, jamais elle ne s'était trouvée dans une situation aussi dangereuse pour sa vie. Sauf...lors d'une de ses expéditions où elle avait dévissé et avait fait une chute de plusieurs mètres.

Quoi qu'elle fasse, l'individu aurait le dessus sur elle, car elle ne pouvait même plus tenir sur ses jambes. Des sueurs froides remontait le long du dos de Sam, tandis qu'elle regardait partout autour d'elle pour essayer de trouver de quoi pouvoir s'en sortir. Rien...il n'y avait rien qui pourrait l'aider. De toute manière, elle n'avait pas d'arme à feu, lui si et s'était cela qui creusait l'écart entre eux. Alors qu'elle croyait que l'inconnu allait l'achever, celui-ci fit marche arrière et retourna momentanément dans son véhicule pour revenir et lâcher une simple phrase d'excuse.

"Vous êtes désolé? C'est tout ce que vous trouvez à dire?!!"

Si Sammy n'avait pas eu aussi mal elle aurait probablement rigolé mais là, elle avait juste envie de lui tordre le cou.

"Eh bien vous savez où est-ce que vous pouvez vous les foutre vos excuses?"

Dit-elle sur un ton plein de hargne et de colère à peine maîtrisée.

"C'est n'importe quoi...bordel...en plus y'a des zombies pas loin, la détonation va les attirer...bravo on peut dire que vous êtes un sacré champion dans l'art de la discrétion!!!"

Il y avait une petite trousse de premiers secours dans son sac mais celui-ci avait été projeté un peu plus loin lorsque l'inconnu lui avait tiré dessus. Elle tendait le bras pour essayer de l'attraper.

"Y'a une...trousse de secours dans mon sac...à moins que vous vouliez me laisser mourir ici?"

La jeune femme adoptait un ton pleine de hargne, ce qui était son droit après tout. Habituellement, Keegan aurait rétorqué, se serait sans doute énervé, mais pas cette fois. Il était en erreur, il avait blessé cette inconnue, c'est pourquoi il devait la soigner. En attrapant les divers bandages, il sourit légèrement quand elle perdit tous ses moyens devant lui, puis il répondit à sa question pleine de rage.

« Rien qui pourrait arranger les choses. »

Certes il aurait pu lui mentir en répondant qu'il croyait qu'elle était dangereuse ou encore la calmer mais au fond, ça n'aurait rien changer. A la suite de cette phrase, il lâcha un regard à la victime de ses actes. Elle pissait le sang, littéralement. En ignorant la plupart de ses insultes, il avançait d'un pas lent et méfiant jusqu'à la femme au piolet. Puis d'un ton un peu plus froid, il s'exprima

« Vous voyez ce qu'il y a au bout de mon arme ? »
Il pointa le bout du canon de son 12 mm à l'aide de son index, tout en continuant à observer la jeune femme
« C'est un silencieux. »

Il ponctua cette phrase en esquissant un sourire ironique qui s'estompa après avoir jeté un regard au sol, coloré par le sang. Il en avait eu peur de ce sang, en Irak. Il était encore une fois, confronté à son passé houleux. C'est à ce moment-là que la victime l'interrompit. C'était une manie chez elle décidément. Elle lui ordonna indirectement de prendre la trousse de secours dans son sac. Même s'il détestait les ordres, il s'exécuta, comme à l'armée.

« Je peux toujours vous tuer maintenant si vous voulez. Sinon arrêtez de bouger. »

A la suite de la réponse de la jeune femme, Keegan fit quelques pas méfiants en titubant, afin de contourner le piolet de celle-ci et d'attraper le fameux sac. Il plongea une de ses mains afin de la ressortir avec une trousse de secours à la clef. Ensuite, il s'installa à son chevet tout en faisant attention au piolet qu'elle tenait. Rustre qui se respecte, il n'a pas eu l'obligeance de lui demander de retirer son haut pour pouvoir observer la plaie. Non lui, a simplement arraché le bout du tissus.
En plus de colorer le sol, le sang colorait les mains du suédois.

Après ça, il la bascula sur le côté sans même lui adresser un mot. Bonne nouvelle, la balle ne s'est pas logée dans un organe. En revanche, impossible de déterminer s'il y a avait hémorragie interne ou non.

«  Vous avez de la chance, la balle est sortie. »

Il retira sa veste et une solution d'eau oxygénée, de la trousse de secours de la femme au piolet, tout en gardant les bandages de l'autre main. Keegan semblait avoir quelques sueurs froides, il n'avait jamais soigné une blessure aussi importante.

«  Laissez moi faire. »
Dit-il d'une voix assurée et grave. Pouvait-elle lui faire confiance ? Lui le gars qui a tenté de l'assassiner et ensuite de la sauver. Elle devait certainement le prendre pour un fou. Même lui se demandait pourquoi il lui avait laissé la vie sauve.

Sam en voulait à ce type qui l'avait tiré comme un lapin -sans mauvais jeu de mot- mais elle s'en voulait également d'avoir été si imprudente. La situation dans laquelle elle se trouvait était en grande partie de sa faute à elle. Pourtant, la jeune femme savait qu'elle devait être prudente. Jamais elle n'avait fait un tel faux pas avant. Mais il était probable que la fatigue et surtout la faim, l'aient poussé à faire fit de tous les principes de survies qui l'avaient maintenu en vie jusque-là.

Si jamais la jeune femme survivait, on ne l'y reprendrait plus. Dorénavant, elle se montrerait encore plus prudente. Enfin...si la balle ne l'avait pas complètement estropiée. Comment pourrait-elle marcher, se déplacer, courir si sa jambe était fichue? Sam regarda le bout de l'arme et elle remarqua enfin le silencieux. Perplexe, elle avait cru que la détonation avait été entendue à des kilomètres à la ronde. C'était curieux comme le cerveau pouvait interpréter faussement les choses.

Ce fut à son tour d'esquisser un sourire ironique en voyant avec quelle prudence le type la contournait prudemment. Il avait probablement raison, car ce petit bout de femme savait très bien se servir de ses armes. Elle avait eu malheureusement à les utiliser. Mais pas pour occire des humains. Pour l'instant, elle les avait utilisé que pour les infectés. Malgré ses airs de tigresse, Sam n'était pas une sauvage, elle n'aimait pas la violence et priait tous les jours pour ne jamais à avoir à tuer d'humains.

"...je ne vais rien vous faire...je ne suis pas vraiment en état de toute façon."

Elle grimaça de douleur lorsque le jeune homme déchira un peu son jean, laissant apparaître sa chaire lésée. Sans ménagement, il la ballota d'un côté sur l'autre pour examiner sa jambe.

"La balle...est-ce qu'elle est en un seul morceau? Il...il faut voir si la balle est entière et c'est pas fragmenté dans la jambe. Si vous la retrouvez pas, faudra fouiller dans la blessure."

Sam n'aimait pas vraiment cette idée mais il fallait faire cela. Sinon, les fragments pourraient infecter la chaire de sa jambe et provoquer des abcès et finir par une septicémie qui, sans antibiotiques, la tuerait. Son coeur commença à battre plus rapidement pour essayer d'amener le plus de sang possible à son cerveau. Sam se senti subitement faible et pâlissait à vue d'oeil à cause de sa blessure. Alors qu'elle se tenait jusqu'à maintenant accoudé, elle se laissa tomber sur le sol de poussière. Un peu moins revêche qu'il y a quelques minutes, Sam regarda l'inconnu qui tenait de l'eau oxygénée dans une main et des bandages dans l'autre.

"Oh...oh! Vous savez ce que vous faites ou bien??? J'ai pas vraiment envie de mourir vous savez."

La jeune amérindienne était inquiète. Elle semblait être un peu dépassée par les évènements. Mais il fallait bien qu'elle se laisse faire sinon elle était bonne pour rejoindre l'armée des morts.

"...J'ai la tête qui tourne."

La jeune femme était plus compétente que Keegan en tant que médecin, c'était une certitude mais dans tous les cas, le suédois ne pouvait pas voir s'il y avait des fragments. Les pertes de sang étant trop abondante, la visibilité était réduite voire anéantie. Ce qu'il allait faire était simple : il commencerait par verser la solution d'eau oxygénée sur la plaie afin de réduire les infections, ensuite il prendrait des compresses stériles provenant de la trousse afin de diminuer l'hémorragie. Après ça, il fouillerait la zone et enlèverait les fragments présents à l'aide d'une pince à épiler et finira par appliquer ses bandages sur la blessure. Simple, mais complexe pour lui à cause de la jeune femme qui parlait sans cesse. D'un ton froid, il s'exclama :

« Du calme ! Je sais ce que je fais. »

En réalité, il ne savait pas du tout mais espérait un miracle ou un truc dans le genre. Qui pourrait croire à un miracle dans un monde comme le notre ? Il se disait qu'elle était folle de confier sa vie à un inconnu, mais en même temps elle n'avait pas tellement le choix. Survivre coûte que coûte.

Il prit la solution d'eau oxygénée rapidement dès que la tête de la jeune femme commençait à tourner. Il savait qu'en lui déversant cette solution, elle allait soit hurler de douleur, soit s'évanouir directement. Il agrippa sa main alors fermement puis lui parla d'un ton plus adouci.

« Tout va bien se passer. »

En faisant attention au volume, le suédois déversa le liquide sur sa plaie très rapidement comme s'il voulait finir tout de suite. D'une façon, c'était la vérité. Il détestait soigner les gens. Ensuite, il prit les compresses stériles pour compresser la plaie calmement. Au fur et à mesure des minutes, les pertes de sang étaient moins abondantes.

Commençait ainsi le plus dur travail : la recherche des fragments. L'homme de 33 ans avait une vue assez réduite. Enfant, il avait évité de peu au port de lunettes. Dans la pénombre, il fit son maximum pour voir s'il y avait des éclats de balle.

« Et merde ! J'y arriverai pas. »

Il était découragé, mais il ne pouvait pas l'abandonner. Il passait presque 1 heure à observer la plaie tout en la compressant. Il aperçut alors deux trois fragments presque imperceptibles. Muni de la pince à épiler, il s'approcha de plus en plus de la blessure pour les extirper le plus précisément possible.

Fragments retirés, il passa sa main sur son front en sueur, puis attrapa les bandages. Il enroula alors la hanche et le haut de la cuisse de la jeune femme avec ceux-ci.
En derniers recours, il prit sa veste pour la déposer sur le corps de celle-ci.
Il éleva la jambe touchée pour favoriser la coagulation donc.
Keegan avait fait tout ce qu'il pouvait pour elle, il était loin d'être un médecin et possédait un matériel très rudimentaire.

Il s'assit et s'affala contre le rebord de son camping-car en observant d'un œil protecteur la femme. Il imaginait qui elle était avant tout ça. Un médecin peut-être ? Une infirmière ?

La mère de Sam était vétérinaire et il lui arrivait parfois de soigner des animaux blessés par balle. Parfois, un chat où un chien. Certaines personnes ne supportaient pas les animaux et n'hésitaient pas à faire preuve d'une grande cruauté envers eux. Sammy avait toujours été une fillette curieuse et il lui arrivait souvent de rejoindre sa mère à la clinique vétérinaire. Sa mère expliquait ce qu'elle faisait aux propriétaires des animaux blessés. "Il faut qu'on s'assure que la balle n'a pas explosé au contact d'un os...si c'est le cas on devra chercher tous les petits éclats pour éviter que ça s'infecte plus tard". C'était ce que disait tout le temps sa mère. C'est pour ça quelle avait pu dire à l'inconnu de fouiller la plaie.

"Ok ok c'est bon j'me calme."

Sam, toujours allongée sur le sol, respirait profondément pour essayer de garder son calme. Elle aurait été plus sereine si elle était dans un hôpital, mais les choses étant ce qu'elles étaient...il fallait se contenter de ça. Mais Sam était quelqu'un qui aimait être aux commandes quand il s'agissait de ses actes, de sa vie. Il était donc très dur pour elle de lâcher prise. Sam arriva à se détendre un peu, mais elle ne pouvait s'empêcher de contracter tout son corps et grimacer de douleur lorsque le type appliquait des compresses sur sa blessure. Et la douleur n'était pas prête de s'arrêter! Car à présent, son sauveur allait lui appliquer de l'eau oxygénée. Et...c'était un antiseptique très agressif qui brûlait.

Pendant un instant, Sam eut envie de mourir, anticipant la douleur. Heureusement, son soigneur saisit sa main ensanglantée, ce qui la rassura malgré tout. Elle serra cette dernière de toutes ses forces, surtout lorsqu'il versa le liquide sur sa chaire à nue. Elle essaya de contenir des hurlements de douleur et se sentis partir. Sam perdit connaissance, terrassé par la souffrance. C'était probablement mieux ainsi. L'individu pouvait à présent soigner la jeune femme sans que celle-ci ne bouge ou ne se plaigne.

Durant son sommeil, Sam ne se rendit compte de rien. Est-ce qu'elle rêvait? Rien de bien cohérent. Une succession d'images sans queue ni tête, parfois elle revoyait le visage de sa famille, parfois elle se retrouvait suspendu à une paroi rocheuse et soudain, elle se retrouvait en train de courir pour échapper à des infectés. C'est alors qu'elle rouvrit les yeux et une vague de douleur l'envahit de nouveau. Il y avait tout de même mieux comme réveil. Elle regarda autour d'elle et reconnu le camping-car et se rappela ce qui lui était arrivé.

"Es-est-ce que je peux avoir...s'il vous plait...un peu d'eau?"

Demanda t-elle d'une voix très basse. Sa bouche était sèche et avec tout le sang qu'elle avait perdu, se réhydrater était important. Elle était encore en vie et constata que sa jambe était pensée assez proprement. Et puis, Sam était encore en vie, cela prouvait sans doute que le type assit contre le véhicule n'avait pas fait les choses à moitié.

"Merci."

Dit-elle simplement. Elle lui était vraiment reconnaissante de ne pas l'avoir abandonné là.