Je marche activement, arpentant les couloirs du laboratoire d’un pas actif. Mon regard n’a de cesse de se lever vers le ciel, observant les nuages noirs qui ne semblent pas arrêter de grossir.Tout le monde est en alerte, tout le monde s’active et prend sous sa responsabilité de faire quelques tâches, de sécuriser une porte ou deux, de rentrer à l’abri un maximum de choses. Je finis par me freiner, guettant ce qu’il se passe autour de moi. Je vois des gens du laboratoire s’affairer, à monter à l’étage un maximum de choses. Qu’il s’agisse d’essence, de nourriture ou de mobilier, tout ce qui peut craindre une inondation est rapidement conduit vers les hauteurs du laboratoire. Aussitôt, je me mets à réaliser certaines choses, à penser à d’autres et à imaginer les pires scénarios qui pourraient avoir lieu sous la tempête. Un léger frisson me saisit, alors que j’imagine ce qu’il pouvait arriver aux personnages blessées, âgées et aux enfants. Comme si Shadow l’avait pressenti, je sens sa truffe froide et mouillée rencontrer ma main, dans une tentative tendre de réconfort. Cette chienne est incroyablement zen, elle me suit comme mon ombre et ne montre pas de signe d’anxiété à cause de la tempête à venir, alors que pourtant, je pensais que les animaux avaient un sixième sens guidé par leur instinct de survie. Elle semble prête à m’assister à tout moment. Je me dirige soudain vers l’infirmerie, informant à tous les enfants que je peux croiser de me suivre, que c’est important. Je viens de décider du rôle que j’aurais pendant cette catastrophe naturelle, j’aiderais les moins aptes à se défendre. Après quelques mètres parcourus, je fais irruption dans l’infirmerie. D’une voix claire, puissante et résonnante, je choisis de m’adresser à tous.

- Que tout le monde me suive. Nous allons mettre en sécurité les blessés, les enfants et les personnes âgées dans une salle à l’étage. On ne peut pas rester en bas, ça reviendrait à être en proie aux eaux en cas d’inondation. J’aimerais que vous vous dirigiez dans le calme à l’étage, en aidant ceux qui ont du mal à se déplacer, en prenant avec vous une couverture au besoin. Si quelqu’un veut me prêter main forte pour trouver une pièce sécurisée et pour tout organiser, j’en serais reconnaissant !

Suite à ma demande, tous se lèvent, commençant à s’activer, ramassant ce qu’ils pouvaient prendre dans leurs bras ; couverture, oreiller, de quoi tenir une nuit pleine avec un certain confort. Une main passe au-dessus de la foule qui se met à se mouvoir doucement. Une femme, avec un joli poupon dans les bras se met à avancer,, elle me rejoint. Elle se porte volontaire pour m’aider et aussitôt, attire mon regard sur un joli trousseau de clés qu’elle fait doucement tinter. Je souris largement et hoche la tête avec conviction. Je ne suis pas là depuis très longtemps, je ne connais pas encore tout. Aussi, j’ignorais que le labo avait un bunker. Je constate aussi, qu’elle parle étrangement, qu’elle prend réellement le temps d’articuler ses mots et aussitôt, je saisis que cette femme est sourde. Je lui souris avec chaleur et garde mon visage bien en face d’elle, articulant également mes paroles pour qu’elle ne rencontre aucune difficulté à me comprendre.

- Je te suis. On te suit tous, je ne sais pas où c’est, mais je trouve que c’est une bonne idée. Tu m’aideras à installer le bunker ? Je vais prendre une couverture et un coussin pour toi. On pourra y installer ton enfant…

Ma hache dans le dos, je souris. C’est selon moi la meilleure arme dont on pouvait disposer dans ce genre de cas. Demain, dès que la tempête sera passée je suis sûr qu’elle nous sera à tous utiles. Shadow, curieuse, vient doucement renifler la jambe de la femme, n’ayant pas l’air du tout agressive, d’aussi loin que je me souvienne, elle a toujours été très douce et intéressée par les enfants. Je me dirige vers un lit et saisi le matériel que je lui ai promis, la rejoignant.

A voix haute à nouveau, j’annonce, demande, que tout le monde se dirige vers le bunker, que c’est là que nous nous installerons. Je finis par me retourner vers Ruth, toujours aussi bienveillant, je la renseigne.

- Je m’appelle Aaron. Elle s’est Shadow, et toi ?

Je te présente Aaron.
Voilà une affirmation, une nouvelle qui me fait sourire à pleines dents. Je ne m’attendais véritablement pas à ça mais comme quoi, le hasard fait véritablement bien les choses.

- Si je peux me permettre ! Je trouve qu’il s’agit d’un très beau prénom.

Lui adressant un petit clin d’oeil amusé, je commence à faire le tour du bunker, m’assurant que personne ne manque de rien, que les blessés sont confortablement installés et que personne ne manque de rien, que personne n’est resté dehors. Je reviens personnellement en arrière, allant voir si Ruth ne manque maintenant de rien. Je m’assois près d’elle, rejoignant ma chienne restée à ses côtés, cette dernière fixant avec beaucoup de curiosité le petit être tout jeune.

- Je laisse le bunker ouvert encore quelques instants. Le temps que tous soient sûrs que rien ne manque, que les derniers à vouloir entrer puissent prendre place. Ca te semble correct ?

Mon regard dérive légèrement sur le poupon, alors que je lui souris tendrement, m’amusant à lui tirer la langue et à faire l’idiot quelques instants.

- Excuse moi … Je ne peux pas m’en empêcher avec les enfants.

Un bébé. C’est un petit être si fragile et si précieux ! Ruth doit sans cesse s’inquiéter pour lui. Le pauvre ne grandira pas vraiment dans un endroit propice au bonheur. Ce n’est n’est pas d’un monstre imaginaire sous son lit dont il aura peur, mais bien d’ouvrir la porte du labo pour se retrouver face à des cadavres en putréfactions qui marchent. Avoir des enfants est quelque chose qui m’a toujours intéressé avant l’apocalypse. Mais maintenant que je vois ce qu’est devenu le monde, je me dis que ce dernier ne verra jamais ma descendance fouler son sol délabré. Mon attention se reporte sur Shadow qui comme moi, se montre incroyablement curieuse par rapport au petit être. Elle est une chienne de nature très calme, mais cette fois, je peux lire de la curiosité qui transpire de son pelage. Elle bouge les oreilles au moindre mouvement de l’enfant, elle sursaute parfois. Sa queue gigote dans tous les sens, toute contente visiblement. Sans cette chienne, j’ignore comment je mènerais ma vie.. aujourd’hui. Je glisse mon regard sombre vers la jeune mère et souffle, toujours avec cette même articulation exagérée pour qu’elle puisse comprendre avec aisance.

- Tu voudrais que je te le garde parfois ? J’ai cru comprendre qu’il n’y avait pas vraiment d’enfants ici… Je saurais l’amuser un peu. T’auras un peu de temps libre pour toi comme ça. T’en dis quoi ? Et en grandissant je lui apprendrais à aimer les animaux. Même si lui est déjà adopté visiblement.

Indiquant du menton ma chienne, toujours dans le même état. J’attends qu’elle me regarde à nouveau et me racle la gorge.

- Je t’avoue être très curieux. Ne prends pas mes questions comme malpolies mais… quel est ton stade de surdité ? Tu ne l’es pas de naissance je me doute, vu que tu parles tu as du entendre à un moment. Mais maintenant. Tu entends quand même la vibrations de ma voix ?

J’écoute la femme parler. Mon regard glisse à nouveau sur l’enfant tandis que j’écoute l’histoire tragique de sa maman. Au moins, puisque ce n’est pas de naissance, son petit garnement  ne sera pas touché par la surdité ! Cela me rassure un peu. Il n’y a surement rien de pire pour une maman que de se dire que par sa faute, son enfant portera une tare à vie. Ruth essaye de me rassurer, de prendre une voix un peu plus joyeuse pour rendre l’annonce un peu moins brutale, mais je n’en fais rien. En effet c’est triste, mais ce n’est pas pour autant que je vais me mettre à la plaindre et continuer des heures sur le sujet. Je suis sûr qu’elle doit avoir horreur de ça et donc, changer de sujet semble être une alternative plus intéressante. J’hoche donc la tête et pointe ma chienne du doigt.

- Elle ne te fait pas peur au moins à fixer ton enfant comme ça ? Shadow est gentille, je te l’ai dit. Malgré ses longs crocs, elle ne s’en sert que pour me défendre. Je pense même qu’elle t’aime bien. Elle n’est pas très compliquée. Je suis sûr qu’elle me trahirait pour un steak bien juteux. Hein la grosse ?

J’attrape son museau de la paume et lui souffle sur le museau, aussitôt elle tente de répliquer en me donnant un coup de patte et pose ses canines sur ma main, sans serrer. Je ris et observe autour de moi. Tout le monde semble installé, plus personne ne sort du bunker, ni ne rentre. Je lève la main et donne quelques ordres à Shadow.

- Pas bougé ! Fixe.

Elle reste près de la jeune femme pendant que je vais fermer le bunker. Voilà, cette fois nous sommes tous installés, les enfants ainsi que les blessés sont ici sécurisés et je suis là pour veiller sur eux. Après un dernier coup d’oeil vers la foule, je reviens m’asseoir avec Ruth.

- La tempête peut commencer.