Nouvelle journée à Fort Hope, nouvelle garde à l’infirmerie pour Juliet, cet endroit qui était devenu sa seconde maison au fil des mois, là où elle passait de nombreuses heures avec plaisir. Dire qu’une peintre était inutile en cas d’apocalypse était loin d’être un euphémisme, et cela faisait de longs mois que la brune tâchait d’y remédier, ayant trouvé en la présence d’Alair, puis de Noah, de formidables mentors prêts à lui transmettre leurs savoirs médicaux. Nul besoin de préciser qu’apprendre à soigner autrui était bien plus utile que manier les pinceaux à la perfection comme c’était le cas de la jeune femme, après des années et des années de pratique. Jules s’avérait être une élève studieuse, prenant des notes, posant toutes les questions qui lui passaient par la tête, étudiant chez elle les quelques livres sur le sujet dont elle disposait. Et il fallait dire qu’elle aimait ça, qu’elle s’était investie dès le premier jour, à tel point qu’elle avait fini par avoir ses propres gardes à l’infirmerie. Oh, elle en était bien loin des opérations à cœur ouvert, mais elle savait désormais soigner ses semblables, du moins les blessures les moins graves, et elle faisait régulièrement l’arrivée des nouveaux venus.

D’ailleurs, c’était ce qu’on attendait d’elle aujourd’hui encore, et Juliet se hâta de rejoindre le bâtiment peu après le déjeuner pour préparer ce rendez-vous, incontournable pour tous les nouveaux habitants du camp. Elle entendit vaguement la porte d’entrée s’ouvrir, et récupéra de quoi noter, et ces espèces de formulaire qui avaient été fait spécialement pour l’occasion. Tout un tas de questions y étaient répertoriées, servant surtout à connaître le passé médical des survivants, ce que Noah estimait utile, juste au cas où. La brune en prit un bon paquet, et sans attendre, elle quitta la pièce dans laquelle elle se trouvait pour se diriger vers celle dans laquelle se trouvait son patient du jour. La porte de la salle d’examen se referma derrière Juliet, et celle-ci remarqua que l’inconnu était déjà installé. Elle se rapprocha à son tour, et déposa les documents sur le bureau, tandis que le survivant s’adressait à elle.

Juliet lui adressa un sourire amusé, tandis qu’elle se permettait de reprendre le jeune homme. « -Oula…juste Juliet. Je ne suis pas docteur. » Elle s’installa sur la chaise qui était la sienne, et prit quelques secondes pour observer le nouveau venu, qui se demandait s’ils ne s’étaient pas déjà rencontrés dans leur ancienne vie. La brune le dévisagea quelques instants, se demandant s’il s’agissait vraiment d’une question, ou d’un vieux plan drague à deux balles. Elle fronça les sourcils à son tour, avant de balayer la question d’un geste de la main. Elle haussa donc les épaules, et adressa un sourire au jeune homme. « -Je vais avoir besoin de votre nom et de votre prénom, pour le dossier. » dit-elle, tandis qu’elle gardait un seul formulaire, et rangeait les autres dans le tiroir du bureau. Elle s’empara d’un style, et nota consciencieusement l’identité du jeune homme : Tyler Thorson. Il fallut plusieurs secondes à la jeune femme pour achever d’écrire les deux dernières lettres, tandis qu’elle fouillait sa mémoire soudain bien plus éveillée. Ce nom de famille lui semblait étonnement familier, et peut-être finalement qu’il avait raison, et qu’ils s’étaient déjà rencontrés. « -Thorson…comme dans Charlotte Thorson ? » Son regard azur sonda le jeune homme, à la recherche de la moindre réaction, qui ne tarda pas à indiquer à Juliet qu’elle avait vu juste, et que ce prénom ne lui était pas inconnu. « -C’est votre mère, n’est-ce pas ? Elle exposait fréquemment ses œuvres dans ma galerie, ici à Détroit. » Elle lui adressa un nouveau sourire, tandis que quelques souvenirs lui remontaient en mémoire, notamment des passages de la femme à sa galerie.

Il n’avait rien fallu de plus que le nom du jeune homme face à elle pour que cela fasse enfin « tilt » dans l’esprit de Juliet, qui mettait les informations bout à bout. Il avait bien raison finalement, ils s’étaient déjà vus avec que la pandémie dévaste Détroit, et plus d’une fois d’ailleurs. Charlotte, sa mère, était une habituée de la galerie que possédait Juliet, et elle y exposait très fréquemment ses œuvres dans les lieux. Voilà où les deux jeunes gens s’étaient rencontrés, bien que cela sembla être sorti de la tête de chacun depuis le temps. La brune lui adressa un sourire amical, tandis qu’il lui confirmait qu’elle avait vu juste dans ses déductions, Jules allant même jusqu’à un léger rire quand il lui rappela les petites siestes improvisées qu’il faisait dans sa galerie. « -Oui, votre mère adorait me raconter vos derniers coups, mais elle ne semblait jamais vraiment fâchée pour autant. » C’était même presque amusant d’entendre les deux mères de famille comparer les exploits, et autres bêtises, de leurs enfants, quand on savait que Tyler avait la vingtaine, et qu’Eulalie n’avait même pas dix ans.

En revanche, s’il y avait bien une chose que Juliet n’avait pas vu venir, c’était ce compliment sorti de nulle part dont il la gratifia. La brune resta silencieuse quelques instants face à l’aveu qu’elle était l’une des raisons de ses visites à la galerie, tandis qu’un sourire amusé s’accrochait finalement à ses lèvres, atteignant rapidement son regard. « -Ah…hé bien…vous auriez dû m’en faire part à l’époque. J’aurai été ravie d’avoir votre version des faits de vos exploits autour d’un café. » Elle l’observa encore quelques instants, le sourire ne quittant pas immédiatement son visage, avant de reprendre la fiche qui portait désormais le nom et le prénom du jeune survivant.

Jules était sur le point de lui expliquer comment leur entretien allait se dérouler, une première partie où elle allait l’ausculter pour vérifier qu’il ne portait aucune morsure, ou même simple blessure, et une seconde partie où elle aborderait avec lui ses éventuels problèmes de santé. Rien qui ne devrait prendre très longtemps en somme. Pourtant, Tyler lui coupa l’herbe sous le pied, poussant la jeune femme à quitter la contemplation de sa feuille pour poser son regard bleuté sur lui, tandis qu’il exprimait ses réticences. « -Oh…à vrai dire, juste en sous-vêtement, ce sera suffisamment. Mais si vraiment ça vous met mal à l’aise, je peux appeler l’un de mes collègues. » Et elle lui adressa un sourire aimable, ne voulant surtout pas le brusquer ou le contraindre à quoi que ce soit. Ce n’était pas la première fois que cela arrivait d’ailleurs, et Juliet et ses collègues avaient toujours trouvé une parade, le plus souvent l’aide d’un collègue de l’autre sexe, pour éviter de gêner au maximum les survivants qui passaient par leur infirmerie.

Juliet était toujours étonnée lorsque le destin, ou quelque chose dans ce goût-là, plaçait sur son chemin des personnes qu’elle avait connu des années plus tôt, dans leur autre vie. Pour le coup, il lui avait fallu le nom de famille du jeune homme pour faire le lien, son visage s’étant effacé de sa mémoire, remplacé par d’autres. Mais la brève évocation de sa mère, qui avait effectivement passé pas mal de temps à la galerie, avait tôt fait de raviver les souvenirs de la jeune peintre. Elle laissa un léger rire quitter ses lèvres aux mots de Tyler, voyant parfaitement de quoi il pouvait parler. Car Jules se remémorait bien des diverses histoires rocambolesques que Charlotte lui avait raconté concernant son fils. Elle n’en fit pas part au jeune homme face à elle, mais c’était bien un truc de mère de famille, ce besoin de parler de ses enfants, de comparer les expériences vécues, les moments passés ensemble.

La jeune brune ne tarda pas à sourire de nouveau face à la proposition de Tyler, tandis qu’elle hochait doucement de la tête. « -Bien sûr ! Je suis toujours partante pour une visite guidée. Mais avant toute chose, je propose qu’on oublie le vouvoiement. Ça fait trop…strict, et bon…vu les circonstances… » Elle haussa les épaules, comme pour montrer l’évidence même. Ils n’étaient qu’une poignée de survivants face à l’invasion des rôdeurs, luttant chaque jour pour leur survie. Ils pouvaient bien s’accorder la familiarité de se tutoyer. Et puis…ils s’étaient connus par le passé, au moins brièvement, et pour Juliet, cela justifiait encore davantage qu’ils passent au « tu ». Et elle n’avait pas menti concernant la visite guidée. Elle vivait à Fort Hope depuis le début de la construction du camp, elle avait assisté à son agrandissement, à ses différents aménagements, aux différentes arrivées. D’ailleurs, il n’était pas rare que suite à cet entretien médical, la conversation s’oriente vers une explication du fonctionnement des lieux, s’il restait des questions laissées sans réponse suite au passage avec Alex, et inévitablement, Juliet finissait par proposer une visite du camp. « -Et puis…on pourra même faire les deux ! Visiter le camp, et même parler du passé ! » Un sourire amical se posa sur ses lèvres, tandis qu’elle posait le stylo avec lequel elle jouait jusque-là.

La jeune infirmière en herbe adressa un nouveau sourire à Tyler, tandis qu’il lui expliquait finalement que se mettre en sous-vêtement ne lui posait aucun problème, et qu’elle pouvait donc continuer de mener leur rendez-vous. « -On est plutôt branché sous-vêtement ici, mais si vraiment tu préfères faire un nu, te gêne pas pour moi ! » Son sourire s’étira encore davantage, tandis qu’elle finissait par lui indiquer la table d’auscultation à quelques pas de lui, afin qu’il ôte ses vêtements, et qu’elle puisse continuer son travail. Elle fit mine de s’intéresser plus que nécessaire à la feuille vierge qu’elle avait devant les yeux pendant que Tyler se déshabillait, et finalement, Juliet le rejoignit. De son regard azur, elle détailla le corps du survivant, à la recherche de la moindre marque suspecte indiquant qu’il aurait fricoté d’un peu trop près avec un ou des rôdeurs. « -Tout me semble nickel. Tu peux te rhabiller si tu veux. » Enfin, s’il voulait…disons qu’une fois l’auscultation faite, rien ne justifiait que Tyler reste à moitié nu, à étaler sa plastique aux yeux de Juliet. La brune ne tarda pas à retourner derrière son bureau, reprenant son stylo pour finalement poursuivre l’entretien. « -Bon…tes antécédents médicaux maintenant. Des choses à déclarer ? »

Juliet esquissa un léger sourire en coin en voyant Tyler prendre tout son temps pour enfiler son t-shirt, sans savoir s’il faisait exprès de faire traîner l’opération, ou s’il s’agissait d’une vraie maladresse de sa part, bien qu’elle penchait plutôt largement pour la première solution. Quoiqu’il en soit, elle avait eu suffisamment de temps pour se rincer l’œil pendant qu’elle l’examinait, et elle avait en plus la bonne excuse de ne faire que son boulot à ce moment-là. Elle tâcha de se concentrer pour effacer le sourire amusé qui étirait ses lèvres, et se racla doucement la gorge, tandis que le survivant finissait par se souvenir comment se rhabiller. La jeune femme attendit patiemment qu’il finisse son petit manège, et ils reprirent le cours de leur entretien, à savoir les problèmes de santé que pouvait avoir le survivant.

La brune fit une petite grimace, et prit quelques notes pendant que Tyler lui racontait que finalement, il semblait avoir une santé aussi bien bâtie que son torse. Elle nota donc les quelques maigres informations données par le jeune homme, y allant pourtant de son petit commentaire : « - Désolée, mais je crois qu’on ne va rien pouvoir faire pour les acariens…M'enfin...un grand garçon comme toi devrait quand même bien s'en sortir malgré tout ! » Et en même temps, si la seule chose dont il souffrait à l’heure actuelle était cette allergie, Jules estimait qu’il n’y avait pas de quoi se plaindre, c’était largement surmontable. Au moins, ils ne risquaient pas de tomber en rade de médicaments, ou de devoir faire une opération d’urgence.

Ainsi, la fiche fut rapidement remplie, et la jeune infirmière en herbe reboucha son stylo, se disant que l’entretien serait donc rapidement terminé, puisqu’ils avaient déjà fait le tour des antécédents médicaux du jeune Thorson. Pourtant, il ne tarda pas à relancer la conversation, en lui parlant de la présence militaire qui avait envahi le camp. La brune laissa échapper un très léger soupir, avant de se laisser aller contre le dossier de son siège, pour se mettre plus à son aise. « -Hé bien…non. Fort Hope a été bâti par des civils. » Elle en savait quelque chose, puisqu’elle était une des toutes premières personnes à s’y être installées, qu’elle avait assisté à l’agrandissement progressif du camp, jusqu’à ce qu’il prenne ses proportions actuelles, et elle avait assisté à l’arrivée des survivants, au départ de certains, bien sûr, à quelques décès aussi. Juliet haussa les épaules un bref instant, tapotant distraitement sur le bureau. « -Les militaires sont arrivés fin avril je dirais, ils sont un peu sortis de nulle part à vrai dire. On survivait comme on pouvait, et du jour au lendemain, ils étaient juste là, devant les barricades, nous expliquant qu’ils étaient là pour nous, qu’on avait plus rien à craindre, tout ce baratin là… »

Et pourtant, il était clair que les choses n’étaient plus aussi roses qu’à leur arrivée, et que des changements s’étaient fait ressentir récemment dans le camp, des altercations qui n’existaient pas au préalable, et dans lesquelles Juliet s’était retrouvée embarquée bien malgré elle. « -J’imagine que je devrais éviter de dire ça, mais…méfie-toi d’eux. » Sa voix avait un peu baissé, inconsciemment, tandis qu’elle se penchait légèrement en avant, comme si elle était en train de lui faire une confidence. Depuis que l’un d’entre eux l’avait balancé brusquement par terre, Juliet ne voyait plus d’un si bon œil leur présence dans le camp. Elle resta silencieuse quelques instants, avant de se souvenir soudainement de ce que Tyler lui avait dit : « -Oh…tu as dit qu’un des militaires t’avait manqué de respect ? Il s’est passé quoi ? »

La tête légèrement penchée sur le côté, Juliet se demandait ce qu’il avait bien pu se passer pour que Tyler lui raconte qu’un des militaires lui avait manqué de respect. Si elle aurait pu se montrer suspicieuse quelques semaines plus tôt, et douter que les uniformes aient pu molester un nouveau venu, elle était aujourd’hui plus que prête à envisager cette possibilité. Elle écouta donc la réponse apportée par le survivant, ne pouvant retenir une grimace à l’évocation de ce nez cassé, et de l’altercation qui avait eu lieu entre Tyler et les militaires qui l’avaient escorté jusqu’à l’infirmerie. Pour elle, ce n’était pas le mieux qu’avait fait le jeune homme, lui qui s’était sans doute mit à dos ces types en vert dès son arrivée, ce qui n’était pas la meilleure des choses qui puisse arriver. « -Fais attention quand même, ils seraient capables de te faire payer ça de façon sournoise… » Elle accentua sa grimace, imaginant sans peine le type qu’il avait amoché en train de ruminer dans son coin, frustré de s’être laissé cogner par un simple civil. « -Enfin…je ne veux pas insinuer qu’ils sont tous mauvais, ou sournois, mais…enfin…tu te feras ta propre opinion… » Et vraiment, elle ne voulait pas l’influencer à ce sujet, surtout pas après sa mauvaise expérience, qui l’avait considérablement marquée.

Juliet ne put masquer sa surprise quand Tyler se releva brusquement, tandis qu’il lui demandait qu’elle était la suite de l’entretien. Elle pianota des doigts sur le bureau quelques secondes en réfléchissant, tandis qu’elle le sondait du regard un bref instant. « -Hé bien… » Juliet se leva à son tour, après avoir écrit la date du jour sur la fiche au nom du survivant, celle qui était quasiment vierge. « -En règle générale, l’entretien se termine là. Aucune blessure, morsure, ou griffure. Aucun problème de santé particulier qui nécessiterait que je te pose des tas et des tas de questions. Mon rôle s’arrête là… » Elle posa une fesse sur son bureau, et s’autorisa un petit sourire, tandis qu’elle regardait l’heure qu’il était. « -Ma garde ne devrait pas tarder à finir…alors, si tu n’as rien à faire, on pourrait se boire cette tasse de café, ou je pourrais te faire la visite du camp. On t’a déjà assigné une maison ? »

Finalement, et en l’absence de tout problème médical majeur, l’entretien avec Tyler avait tourné plutôt court. En soi, c’était loin d’être une mauvaise nouvelle, cela voulait même dire que le jeune homme était un survivant en pleine forme, qui ne présentait aucune blessure, qui n’avait aucun souci de santé, et qui n’aurait donc aucun besoin particulier de médicaments ou de soins. Dans un monde parfait, idéal même, Juliet aurait adoré que ce soit le cas de chacune des personnes qui foulaient le sol de son infirmerie, mais ce n’était malheureusement pas possible. Au moins, avec Tyler, elle savait qu’elle n’aurait pas à se préoccuper de sa santé, à moins qu’il ne se mette en danger, ou ne fasse une mauvaise rencontre. Elle l’écouta malgré tout lui dire à sa façon qu’il ne comptait pas se laisser faire par ces militaires, et afficha un air dubitatif : « -Je ne doute pas une seule seconde que tu sois solide, comme tu dis, mais reste prudent. D’accord ? » La brune se leva donc, et déposa le maigre dossier de Tyler sur le meuble à côté de l’entrée, pour aller le ranger avec les autres, dans ce qui servait de bureau.

Quand elle se retourna de nouveau pour faire face à Tyler, elle ne put passer à côté du regard qu’il avait posé sur elle, et qui fit naître un petit sourire amusé au coin de ses lèvres. « -J’espère que la vue te plaît. » Elle s’amusa de l’instant quelques secondes, avant de revenir vers son bureau, non sans s’être départi de son sourire. Le jeune survivant accepta sa proposition de prendre un café, et Jules hocha doucement la tête en signe d’acquiescement. « -La relève devrait arriver d’ici une demi-heure, on pourra aller chez moi, j’habite à quelques pas de l’infirmerie. » Et puis, Noah venait toujours en avance, alors avec un peu de chance, Juliet serait libérée de ses obligations un peu plus tôt. « -Et pour ce qui est du café, tu vas pouvoir te réhabituer à ce merveilleux breuvage ! On en a quasiment tous les mois ! » Et ce n’était pas pour déplaire à Juliet, qui était tombée dans la marmite de ce doux élixir quand elle avait travaillé dans un café pour payer ses études, de nombreuses années plus tôt.

Le regard azur de Juliet suivit celui de Tyler, tandis qu’il se retournait subitement vers la table d’auscultation, sans qu’elle ne comprenne bien le cheminement de ses pensées. Elle fronça doucement les sourcils, mais le jeune homme ne fit aucun commentaire, et enchaina bien vite sur un autre sujet, un sujet auquel Jules avait l’habitude d’être confrontée. Elle prit une position plus confortable sur sa chaise, avant de croiser les jambes : « -Je suis là depuis le tout début en fait. Je faisais partie du petit groupe de survivants qui a trouvé cet endroit, il y’a une éternité, quand il n’y avait encore aucune barricade, ou tours de garde, et si peu d’habitants. » Elle lui adressa un petit sourire, et machinalement son regard se porta à l’extérieur, et du peu qu’elle pouvait voir de Fort Hope par la fenêtre. Elle avait été parmi les premières à poser ses affaires dans l’une des maisons de Grand Marais Street, avec Eulalie et Kelly, sa compagne de l’époque. Deux personnes qui l’avaient désormais quitté.

Des bruits caractéristiques se firent entendre au rez-de-chaussée, avant que la voix de Noah ne monte jusqu’à l’étage, pour annoncer qu’il était arrivé. Un sourire sincère se posa sur les lèvres de Juliet, qui invita Tyler à se lever, et à quitter la pièce derrière elle, tandis qu’elle emportait son dossier. Le duo arriva dans la pièce principale, où Noah retirait sa veste. « -Bonjour Noah, tu vas bien ? Je te présente Tyler, un nouvel arrivant ! » Et elle les laissa quelques instants, le temps d’aller ranger le dossier dans le bureau, et de récupérer ses quelques affaires. Juliet expliqua alors à la relève sa garde de la journée, lui faisant promettre de l’appeler au moindre besoin, puis, elle poussa gentiment Tyler hors du bâtiment après un dernier sourire à son collègue et ami. « -J’habite juste là ! » dit-elle en tendant le bras, tandis qu’elle l’entraînait en direction de son chez elle, où ils arrivèrent rapidement. Une fois à l’intérieur, Juliet alla bien vite mettre de l’eau à chauffer, pour deux cafés, tandis qu’elle disait au jeune homme de s’installer et de faire comme chez lui.

Mettant en route la petite bouilloire qu’elle avait trouvé en emménageant dans cette maison lors de son arrivée au camp, Juliet fit donc chauffer de l’eau, afin de préparer deux cafés. Elle ne manquait jamais une occasion de pouvoir s’abreuver de ce qui était sa potion magique à elle, car même après des mois de sevrage forcé par l’apocalypse, l’addiction était toujours là. Pendant que l’eau chauffait, la jeune femme sortit deux tasses de l’un des placards de sa cuisine, et sacrifia une dose de son propre café pour en emplir le récipient destiné à Tyler. Ce dernier, qui était resté dans le salon sur lequel Jules pouvait avoir une vue directe puisque la cuisine était ouverte sur ladite pièce, ne tarda pas à lui poser une question qui, l’espace de quelques secondes, serra le cœur de la jeune femme dans sa poitrine. L’artiste mit quelques instants à répondre, le temps que son léger malaise passe. « -Je vivais ici avec Maddie, ma meilleure amie. Mais elle a pris la route il y a quelques mois avec son mec, un scientifique qui bossait sur l’épidémie. » De longs mois depuis lesquels Juliet n’avait plus aucune nouvelle de ce qu’était devenue sa rousse préférée. Malgré cela, elle essayait de positiver en se répétant ce dicton qui disait que lorsqu’on n’avait pas de nouvelles, c’était en soi une bonne nouvelle.

L’eau ne tarda pas à frémir, et Juliet retira la bouilloire de son support juste avant le premier bouillon, pour emplir les deux tasses, tandis qu’une bonne odeur s’élevait dans la cuisine, gagnant sans doute le salon. Attrapant finalement les deux cafés, puis du sucre, elle retourna vers Tyler, disposant sur la table basse sa tasse, et de quoi adoucir son breuvage s’il le désirait. « -Maintenant, il n’y a plus que Gandalf et moi dans cette immense maison ! » dit-elle, tandis que du menton, elle désignait la boule de poils blanche qui dormait dans l’un des canapés à côté d’eux. Juliet n’avait jamais vraiment été une grande adepte des animaux de compagnie, mais ce chat, squelettique quand il était venu aux abords de sa maison, ne lui avait pas vraiment laissé le choix d’une éventuelle adoption. Il s’était imposé de lui-même, et quand Juliet se retrouvait confrontée au silence de sa maison, tard dans la nuit, elle était bien contente que le petit animal soit là pour la réchauffer de ses ronrons.

La brune retira finalement ses chaussures, et récupérant sa tasse de café, elle s’installa à son tour dans le canapé, non loin de Tyler, les jambes repliées sous ses fesses, les deux mains autour du pot pour se réchauffer. Elle resta silencieuse quelques instants, humant la délicate odeur, avant de prendre une gorgée brûlante qui lui fit fermer brièvement les yeux. « -Hm…est-ce que tu sais déjà où tu vas travailler ? Alex t’a parlé des différents postes qu’on a à Fort Hope ? » demanda-t-elle subitement, les sourcils légèrement froncés. C’était une des clés pour trouver sa place dans le camp, se trouver un petit job, parler aux autres survivants, intégrer la communauté. Jusqu’à il n’y avait pas si longtemps, chaque poste était géré par un habitant du camp. Mais depuis l’arrivée des militaires, ces derniers se mêlaient à leurs tâches quotidiennes, prenant eux aussi une part active dans la vie de Fort Hope. Et si Juliet trouvait que c’était une bonne initiative lors de leur arrivée, les récents événements qui avaient secoué le camp lui avait fait revoir sa position sur le sujet.

Juliet se positionna plus confortablement dans le canapé, se mettant en tailleur, tandis qu’elle serrait contre elle sa tasse de café, son remontant à elle. La brune tourna légèrement son regard vers son interlocuteur, tandis que Tyler lui confiait ce métier qu’il exerçait avant la fin du monde, et qui du coup, avait une influence directe sur le poste qu’il comptait occuper, ici, à Fort Hope. La jeune femme hocha de la tête face à l’annonce, se faisant la remarque silencieuse qu’elle n’aurait jamais pris le risque de parier qu’il était ébéniste, elle qui l’aurait, sans trop savoir pourquoi, plus imaginé en costume cravate à travailler avec les chiffres toute la journée.

Elle ne retint pas un léger rire quand il lui expliqua qu’il avait besoin de beaucoup d’occupations pour éviter de faire quelques petites bêtises. Elle avait cru le comprendre, oui, quand il lui avait expliqué qu’il avait eu fortement envie d’en venir aux mains avec les militaires qui l’avaient escorté jusqu’à l’infirmerie. « -Je suis sûre qu’avec tout ça, tu n’auras pas le temps de t’ennuyer ! » souffla-t-elle, un sourire aux lèvres, avant de boire une nouvelle gorgée de café. Elle aussi aurait bien voulu que son ancien travail lui permette d’occuper un poste avec facilité, mais hélas, avec ses compétences en peinture, ou avec un crayon entre les mains, Juliet n’allait pas bien loin. Malgré tout, elle pouvait dire qu’elle pensait avoir trouvé sa place à l’infirmerie, même si ça n’avait pas été une évidence pour elle. Pas plus que le travail qu’elle effectuait dans les jardins, d’ailleurs. Mais tout comme Tyler, Jules avait besoin d’être occupée, pas par crainte de finir par faire une bêtise, non, mais simplement parce qu’elle en avait besoin pour ne pas devenir dingue. Elle n’avait jamais été de ceux qui parviennent à rester tranquillement chez eux, à traîner toute la journée. Elle s’ennuyait beaucoup trop rapidement à son goût.

La gorgée de café qu’elle était en train de boire manqua de l’étouffer quand Tyler la questionna à propos de Logan. Jules fronça doucement les sourcils, avant de secouer légèrement la tête. « -Hum, non, Logan et moi n’étions déjà plus ensemble à l’époque où j’avais la galerie. » Cela faisait même quelques années que le couple s’était déjà séparé, et quand la galerie avait fini par ouvrir, cela devait correspondre au moment où Juliet avait présenté à Logan sa fille, et qu’elle l’avait laissé prendre une place dans la vie de la gamine. Une période compliquée, à laquelle Jules refusa de réfléchir plus longuement que nécessaire. « -En tout cas oui, Logan est toujours en vie. Malgré la présence de l’armée, il est toujours le leader du camp. Tout ça, c’est grâce à lui ! » Elle fit un vague geste de la tête, comme pour englober silencieusement les lieux autour d’elle, tandis qu’un sourire se posait une nouvelle fois sur son visage. «-Tu l'as déjà rencontré ?» demanda-elle subitement, fronçant légèrement les sourcils.

Si elle avait répondu presque du tac au tac, sur le ton de la conversation lorsque Tyler l’avait questionné sur Logan, ce n’était qu’à cet instant précis que Juliet trouvait cela…étrange. D’où lui étaient venus ses interrogations sur le barbu ? Son visage exprimait clairement sa perplexité à cet instant précis, que la jeune femme ne chercha pas à dissimuler. Elle observa le jeune homme déposer sa tasse sur la table basse, puis se tourner vers elle, avec une expression sur le visage qu’elle eu du mal à déchiffrer. Se payait-il sa tête en ce moment même ? Juliet le fixa sans détourner le regard en fronçant doucement les sourcils, tandis que Tyler reprenait la parole, en expliquant qu’il n’avait pas encore rencontré Logan. Et soudainement, son expression se relâcha, jusqu’à ce que de l’incrédulité se peigne sur ses traits, face à l’aplomb du jeune homme, et cette affirmation qu’il venait de lui lâcher. « -Ouah…on peut dire que tu ne perds pas de temps toi ! »

Et elle se réfugia pendant quelques secondes derrière sa tasse pour avaler plusieurs gorgées de café à la suite. Après quelques instants de silence, Juliet baissa finalement ses mains, posant la tasse contre sa cuisse, avant de hausser les épaules. « -J’ai eu un enfant avec lui, et il a été là pendant quasiment la moitié de ma vie, je pourrais difficilement tourner la page, tu sais… » Elle lui adressa un petit sourire léger, peut-être un peu nostalgique, avant de poser son regard sur Gandalf. Logan et elle s’étaient aimés comme Juliet n’avait aimé qu’une seule fois dans sa vie, pendant cinq longues années, avant qu’elle ne prenne la pire décision qui soit, celle qui avait mis un terme à leur relation à l’époque. Et depuis…depuis, les choses avaient changé, bien sûr, et ils étaient passés par tellement de phases qu’elle en perdait le décompte : la colère, l’ignorance, la tolérance, ce qui ressemblait à de l’amour à nouveau,... Bref, dire que leur histoire était un brin compliquée n’était pas un euphémisme. Mais Juliet évitait d’y penser, surtout maintenant que Logan était veuf, et pleurait sans doute encore la perte de Joy.

Elle acheva le contenu de sa tasse, et la posa contre le dossier du canapé, avant de se tourner une nouvelle fois vers Tyler, qui semblait toujours la fixer avec amusement. « -De toutes façons, qui a le temps pour les histoires d’amour par les temps qui courent ? Sérieusement…tu veux un rencard avec une fille, tu fais quoi, tu l’amènes au ciné du coin ? Puis au resto ? » Elle lui adressa un sourire plus franc, se moquant de ses propres paroles, alors que la boule de poils s’étirait soudainement et sautait du canapé pour venir la rejoindre.

S’il y avait bien une chose à laquelle Juliet ne s’était pas attendue, c’était au fait de devoir évoquer sa relation avec Logan en présence de Tyler, et à la demande de celui-ci. C’était plutôt inattendu, et la brune ne savait pas vraiment comment ils en étaient arrivés là. En plus d’aborder ce sujet, qui à défaut d’être tabou n’était pas aisé, le jeune homme se montrait direct, ce dont Jules n’avait pas forcément l’habitude. Mais malgré tout, elle pensait s’en être bien sortie avec sa réponse, expliquant, sans trop en dire, à quel point la situation pouvait parfois être compliquée entre Logan et elle.

Quoiqu’il en soit, elle avait tenté de changer de sujet de conversation, ou plutôt de s’éloigner du centre de celle-ci, en faisant remarquer la complexité de pouvoir avoir un rencard digne de ce nom de nos jours, tandis que ses doigts fins se perdaient dans le pelage blanc de son chat. Si les choses continuaient ainsi, Juliet finirait par être la vieille fille avec son chat de Fort Hope, celle qu’on évitait parce qu’elle était toujours de mauvaise humeur, et cette simple idée la fit sourire toute seule. Elle n’eut cependant pas l’occasion de continuer son délire bien longtemps que Tyler reprit la parole, tandis qu’elle relevait un regard pétillant vers lui. Lui, avoir du mal à convaincre une demoiselle de faire un tour dans sa voiture ? Elle avait bien du mal à y croire ! « -Oh, arrête, je suis sûre que t’as toujours la côte avec les filles ! Ta mère disait de toi que tu étais un vrai Don Juan ! »

Elle lui adressa un sourire amusé, alors que le reste de sa phrase, sur les films d’horreur, provoquait chez elle la naissance de quelques souvenirs. Une soirée, où, complètement paniquée, Juliet était arrivée chez Logan, persuadée que quelqu’un s’était introduit chez elle, et essayait de la rendre dingue. Au final, ça avait bien été le cas, Joshua était entré dans son domicile par effraction, mais ce soir-là, Logan n’avait trouvé aucune preuve de son passage, et inquiet pour la santé mentale de la brune, lui avait proposé de venir passer la soirée chez lui. Ils y avaient regardé l’un des films préférés du barbu, une de ces histoires de tueurs qui faisaient tant peur à Juliet autrefois. « -Hum…donc ton truc, c’était d’emmener une fille voir un film d’horreur pour que, paniquée, elle s’accroche à toi en pleine salle de ciné ? » Elle lui adressa un sourire malicieux, alors que le chat finissait par s’installer confortablement sur ses genoux en ronronnant. A mieux y réfléchir, Juliet n’aurait même pas su dire de quand datait exactement son dernier rencard, ni même ce qu’elle y avait fait. A croire que cette nouvelle vie de survivante lui avait fait revoir ses priorités.

Au final, Juliet avait passé pas mal de temps avec la mère de Tyler. Dans le cadre du travail, bien sûr, pour préparer une prochaine exposition, ou tout simplement le temps de prendre un café. Et la compagnie de cette dernière était très appréciée. Certes, les anecdotes qu’elle racontait sur son fils ne manquaient jamais d’amuser la jeune peintre, mais c’était surtout sa gentillesse que retenait Jules de ces rencontres. Elle laissa un sourire énigmatique étirer ses lèvres quand le jeune Thorson lui demanda ce que sa mère avait bien pu lui raconter, jusqu’à ce qu’un léger rire quitte ses lèvres. « -Rien en détail, ne t’inquiète pas. Simplement que tu n’avais pas encore rencontré la perle rare pour te poser réellement…mais que tu cherchais avec assiduité ! » Et elle lui fit un nouveau sourire amusé, qui fit pétiller son regard. Sa mère lui avait murmuré, plus d’une fois, qu’elle avait hâte que son fils trouve chaussure à son pied, mais que lui ne semblait pas si pressé que cela, ce qui ne manquait pas de l’agacer.

Sans se départir de ce léger sourire qui flottait sur ses traits, Juliet écouta Tyler lui raconter la façon dont il s’y prenait autrefois pour séduire la gente féminine, et son assurance ne manqua pas de l’amuser. Même si, pour le coup, elle était entièrement d’accord avec lui sur un point. « -Le feeling, il n’y a que ça de vrai ! » confirma-t-elle, en hochant légèrement la tête. Et puis…elle n’avait jamais vraiment aimé tout ce qui était planifié avec rigueur à l’avance, Charles, son cher père, et ses méthodes d’éducation psychorigides l’avaient vacciné contre cela, et Jules avait fini par se dire que rien ne valait l’imprévu, et l’aventure. Le frisson de l’inconnu, en quelques sortes ! La brune observa pendant quelques instants Tyler, avant de détourner le regard, ne remarquant qu’à cet instant qu’il semblait plus proche qu’au préalable. « -En tout cas, si tu trouves une jeune femme à ton goût dans le coin, n’hésite pas à me faire part de tes méthodes de drague post-apocalyptiques, peut-être qu’un jour ça pourrait finir par me servir aussi ! » Et un nouveau sourire peignit ses traits, plein d’autodérision, puisque la jeune femme ne pensait pas une seule seconde à une quelconque relation amoureuse en ce moment. Ou du moins, c’était ce dont elle essayait de se convaincre.

Juliet n’avait pas voulu se montrer indiscrète en abordant le sujet de la vie sentimentale de Tyler, simplement, elle se souvenait de toutes ces remarques que lui faisait sa mère, et qui ne manquaient jamais de faire sourire la brune. Mme Thorson revenait d’ailleurs tellement souvent sur le sujet de la vie amoureuse de son fils que Jules c’était demandé plus d’une fois si elle ne cherchait pas à jouer les entremetteuses entre son rejeton et la galeriste. Une question qu’elle n’avait jamais osé poser, le doute subsisterait donc à vie. Elle hocha de la tête aux paroles de Tyler, tandis qu’un nouveau sourire glissait sur ses lèvres. « -C’est ça…je crois qu’elle mourrait d’envie d’avoir enfin une belle-fille. » Et elle le gratifia d’un clin d’œil, avant de rire légèrement.

La jeune femme étouffa un léger bâillement, avant de froncer les sourcils quand Tyler sembla s’étonner qu’aucun homme du coin ne soit venue la draguer. Elle ne manqua pas de rosir légèrement face à tous ces compliments qu’il lui adressait soudainement, elle qui avait parfois bien du mal à accepter les mots agréables que l’on pouvait lui dire. Ils avaient la fâcheuse tendance de la mettre mal à l’aise. De toutes façons, même si le jeune homme, ou la jeune femme, Juliet était ce que l’on pouvait appeler ouverte d’esprit, agitait devant ses yeux un panneau annonçant qu’il ou elle était en train de la draguer, elle ne le verrait probablement pas. Juliet n’était de toute façon pas du genre à se préoccuper plus que de raison du sujet de sa vie amoureuse, et puis…et puis bien sûr, il y avait Logan, et cette déclaration qu’il lui avait fait près de deux mois plus tôt. Elle choisit cependant de ne pas en parler, mais dévoila malgré tout quelques informations sur elle. « -Oh…j’ai eu quelques relations…mais, rien de bien sérieux à vrai dire… » Anna n’avait partagé sa vie, pour ne pas dire plutôt son lit, que très brièvement, et sa relation avec Lïnko n’avait pas duré plus de quelques mois, tout comme celle qu’elle avait partagé avec Kelly, avant que celle-ci ne quitte brusquement le camp, sans donner réellement les raisons d’un tel départ à la peintre.

A bien y regarder, peut-être que les différents échecs sentimentaux qu’avait vécu la jeune femme l’avaient vacciné pour une bonne période. Elle n’avait pas menti en disant qu’une relation amoureuse n’était pas dans ses priorités. Si cela devait arriver, elle aviserait, bien sûr, mais ce n’était pas pour autant que Juliet allait organiser des soirées de speed-dating à Fort Hope, qu’elle ferait paraître dans la Gazette du camp, pour attirer les âmes esseulées. Voilà une idée qui la fit sourire seule, en aparté, avant qu’elle hausse les épaules à l’intention de Tyler. « -Oh, et puis après tout, on a toute la vie devant nous, on verra bien de quoi demain sera fait ! » dit-elle de façon tout à fait ironique, avant de se relever, récupérant les deux tasses pour retourner dans la cuisine. « -Tu veux boire autre chose ? »