Je comprends pas. Je refuse de comprendre. Je ferme les yeux et serre la main de Sidney encore plus fort. Les lèvres tremblantes, je sens les larmes couler sur mes joues, mais je bouge pas, même pas pour les essuyer, parce que je sais que sinon, je vais me précipiter vers cette caisse en bois qui renferme le corps…. J’ouvre les yeux et les larmes coulent encore plus rapidement, alors que je contemple le cercueil de papa. Toute sa brigade est là, le capitaine aussi. Ils ont fait des discours, certains, après que le prêtre ait parlé, pendant qu’on restait assis en face du cercueil recouvert du drapeau américain.

Et puis, on doit se lever. Le capitaine de papa finit par venir vers nous avec le drapeau que les collèges de papa ont plié en triangle. Il le donne à Sid en lui disant d’être courageux et de veiller sur sa petite sœur, sur moi donc, il me sourit tristement et m’effleure la joue. Et moi ? J’ai pas de drapeau moi ? J’ai pas à être courageuse ? J’ai pas à veiller sur lui ? Pourquoi ? Parce que je pleure, parce que je suis une fille, parce que je suis plus petite, parce que quoi ? C’est nul. Et bête. Je sers à quoi moi alors ? Je peux faire quoi pour avoir moins mal ? Je peux rien faire, c’est foutu, j’aurais toujours ce trou béant ?
Je baisse la tête et regarde mes pieds, chaussés dans d’adorables ballerines noires. Aussi noirs que ma robe et le gilet, achetés exprès pour aujourd’hui. J’avais pas de robe noire et la dame a dit qu’il en fallait une, que je pouvais pas mettre ma robe rose à liserée bleue, avec des bicyclettes et des petites filles et des fleurs sur le bas, même si c’est la préférée de papa et qu’il adore me voir avec. Ça aurait été mieux que d’être toute en noir, il aime pas le noir... il aimait pas…

Et tout le monde passe devant nous. Mentionnant comme papa était courageux. Qu’il avait sauvé la vie de plein de gens. Que sans lui, les gens dans cette banque seraient morts. Que c’est un héros. Qu’on peut être fier de lui.
Je comprends pas. Il est plus là. Ça sert à quoi d’être fiers ? Je sais que c’est pas bien, mais je m’en fiche des autres, je voulais juste qu’il continue de me lire les contes d’Andersen le soir, on a pas fini le livre, je voulais qu’il nous emmène manger une glace au parc dimanche, qu’il me court après en menaçant de me manger et que j’arrive plus à respirer tellement je ris. Mais il le fera plus. Je le verrai plus. Comme maman. Sauf que maman, je m’en souviens plus, alors c’est moins grave. Et je pleure encore plus. Parce que ça se fait pas de penser ça, parce que je sais qu’elle m’aimait autant que papa.

Alors je me réfugie dans les bras de Sidney. Tant pis pour les autres, je m’en fiche de ce qu’il pense. Je le serre contre moi et j’enfouie mon visage contre lui.
Promis, après, je pleurerai plus. Après, je serai courageuse et forte pour veiller sur lui aussi. Après.


Je le fixe de mes yeux bleus un peu trop écarquillés. Pour de vrai ? Il est sérieux ? Et j’ai un mince sourire qui s’agrandit quand je fais courir mes doigts sur la carrosserie. Je peux la réparer ? La trifouiller ? Dessiner dessus ? Bon, peut-être pas non plus, rien de tout ça même, c’est même pas du tout ce qu’il a dit, mais pour moi, ça revient au même.

« Elle est vraiment à toi ? Tu sais en faire ? Sans déco… sans rire ? Elle est trop classe ! Elle va vite ? Vite comment ? Tu tombes jamais ? Tu t’es déjà blessé ? T’as pas peur ? Ça doit être trop cool !  Et ça doit faire trop peur… »

Tout en parlant, j’ai relevé les yeux vers lui et je le dévisage, comme s’il avait le secret de la vie éternelle ou qu’il avait rencontré tous les membres des Backstreet Boys. Je cligne des yeux en me rendant compte qu’il est grand quand même. Peut-être plus que Sid même. Mais c’est pas l’important. Je sais que les autres s’attendent à ce que je fasse des trucs de filles comme elle, enfin, je crois, normalement, les filles de 8 ans, ça joue aux barbies et à la dinnette, blablablaaaaaa comme dirait Paula. Elle est fatigante Paula, en plus d’être chiante et sévère. Je l’aime pas. Lui non plus, je l’aime pas, même s’il sourit souvent. Donc moi, j’aime pas ces jeux, c’est idiot. Mais cette moto, en vert fluo, elle a trop la classe. Et ça doit être chouette de savoir conduire ça. Je saaaiiiis, je suis trop petite. Mais il a bien dit que…

« Je pourrais ? Regarder et aider quand tu bricoles ? Tu vas m’apprendre? Ce serait trop trop cool ! Sid, il sait pas faire ça. Il sait faire plein de trucs, comme euh attraper les araignées et les mettre dehors sans les tuer, il bouge pas pendant super longtemps quand j’essaie de le dessiner, il sait manger 10 flamby en les gobant, et il est super doué aux trucs de magies, il fait apparaître des pièces et tout même ! » Je hoche la tête vigoureusement comme pour approuvé mes dires. « Tu vas voir, il est trop cool ! Jsuis sûre vous allez bien vous entendre. Enfin, ce serait bien, tu vois… »

Et je repose le… truc, la clef truc à la forme bizarre là, et croise les mains dans mon dos, arborant un air de petite fille sage. Et je lui souris. Parce que ça marche souvent quand je souris. Je suis douée pour ça qu’il a dit Sid. Pour embobiner les gens et avoir ce que je veux sans en avoir l’air. Mais faut pas le dire, ça se fait pas il a dit. Mais c’est cool.


Je frotte mes mains avec la brosse, le visage fermé, me mordant la lèvre. Dix minutes que je frotte et j’ai toujours les ongles noirs. C’est quoi cette merde de graisse qui colle ? Il faut que ça parte, si ça part pas, Paula va encore m’engueuler et me punir. Rien que d’y penser j’ai la gorge qui se serre et les larmes qui menacent de me monter aux yeux. Alors je frotte plus fort, même si l’eau commence à se teinter de rouge. Hors de question qu’elle me refoute dans la cave. Il fait noir, y a des araignées, des rats et Dieu sait quoi encore. Et puis, je veux pas encore leur mentir en disant qu’y a rien, parce que je veux pas qu’ils sachent... Je sais qu’elle aime pas que je passe du temps à bricoler sur la moto avec Arthur et Luke, plutôt que de travailler dans la maison, à m’occuper du linge ou de la cuisine. Pourtant je travaille quand même. En rentrant de l’école, je passe l’aspirateur et je nourris les animaux, en nettoyant les cages. Je devrais pas avoir à faire plus. Bon, je devrais pas à avoir à faire quoique ce soit, mais ce serait sans doute trop demander.
Et je me fige en entendant les pas derrière moi, mes yeux s’écarquillant.

« T’as encore bricolé la moto de Luke ? »

Je soupire en fermant les yeux une seconde, avant de me tourner et de regarder Axel qui vient s’installer à côté de moi, posant son cul sur le rebord de l’évier. Elle a ce petit sourire en coin qui m’exaspère, celui qui dit je sais vachement plus de trucs que ce que je dis et que ce que tu crois. Elle m’attrape la main et me fait arrêter. Je lui jette un coup d’œil et ma mâchoire se crispe, pour pas qu’elle voit mes lèvres trembler.

« Fallait changer la bougie et la courroie de distribution et… Ouais tu t’en fous… Ils ont pas racheté la bonne graisse, enfin Arthur a dû prendre la moins chère et elle… elle part pas. J’arrive pas à la faire partir. Paula, elle aime pas et elle… »

« Tu saignes… » Elle attrape une serviette et m’essuie les mains. « Viens on va trouver une solution. Mais d’abord, on va désinfecter ce que t’as fait… »

Je hoche faiblement la tête, essayant de répondre à son sourire sans grand succès. Elle va trouver quelque chose hein ? Ouais, évidemment, elle l’a dit.


Je lui souris et continue de lui raconter tout ce qui s’est passé cette semaine, la semaine dernière, enfin depuis la dernière fois qu’on est venus. Je fais des efforts au collège, j’ai plus eu de mots, de remarques, ou même d’absence. Je fais même mes devoirs plus sérieusement et j’ai eu des meilleures notes. C’est toujours pas fabuleux, j’ai toujours du mal à lire, mais y a des progrès. Pour lui, pour eux. Parce que je leur ai promis de travailler et de réussir. Bien sûr, je leur cache que certains nous emmerdent, Robin et moi, parce qu’avoir des frangins en prison, ça favorise pas vraiment la compréhension. Mais on leur dira pas. Déjà, parce qu’ils ont assez de problèmes comme ça je suis sûre. Et puis, parce qu’on s’est promis, toutes les deux, d’être assez fortes et de les aider, pas de les inquiéter. Et aussi parce qu’on arrive à se débrouiller. On est peut-être des poids plumes, mais on sait se défendre. Au moins pour ce qui est de les envoyer chier. Et les bleus, c’est facile à cacher. Enfin, on se fait pas non plus battre, mais disons que les marques sur les poignets ou dans le dos, à force d’être repoussée contre les murs, ça, ça arrive. Mais c’est pas grave. Tant qu’on peut les voir. C’est pas assez, carrément pas, mais Drew nous emmène aussi souvent qu’il peut et c’est déjà ça.

Ils ont l’air fatigués. Et ils ont maigris, je crois. Tous les deux. Et puis… je sais pas, plus… froids. Ils disent que ça va, qu’ils sont contents de nous voir, qu’ils s’en sortiront. Tous les deux. Et je souris. Les autres parlent et sourient aussi, qu’on voit l’un ou l’autre. Je sais pas s’ils sont vraiment dupes, Robin, peut-être, si elle veut vraiment y croire… Mais il ya cette ombre. Sid essaie de se comporter comme avant, il y arrive à peu près. Luke par contre, je sais pas, j’ai l’impression qu’il évite mon regard. Mais je me fais sans doute des idées.

Ils me manquent. Tous les jours. Je sais, je suis pas toute seule, j’ai Axel et Robin, on est toutes les trois et c’est cool. Seulement, c’est pas pareil. J’avais jamais été séparé de Sid. Comment je peux continuer sans lui ? Il a toujours été là, il m’a toujours soutenu, il… C’est ma famille, mon unique famille. Et puis, j’ai même plus Luke. Et même si c’est bizarre, c’est quand même avec lui que je passais le plus de temps, c’est lui qui… quand je rentre, je fais encore un tour par le garage et je m’arrête, le cœur lourd, en voyant sa moto sous une bâche.
Mais j’ai promis de tenir. Alors je souris et raconte l’expérience ratée de chimie de la veille.

« … Et les mèches roses, ça vient de là ? » Je le fixe et ouvre la bouche, ne sachant pas trop quoi répondre. « J’aime bien, ça te va bien. »

Je souris à nouveau en secouant la tête, faisant voler mes cheveux autour de ma tête. Et ce sourire-là était sincère.

*****

J’ai du mal. Plus ça va, moins j’arrive à faire semblant. Axel s’est barrée. Je lui en veux pas, je ferais la même chose si je pouvais. Pis bon, elle a pas eu le choix, ils l’ont foutu dehors. Reste plus que Robin et moi. Et Dieu sait que c’est dur. Je l’adore, mais c’est plus pareil. On avait réussi à construire quelque chose, je veux dire, j’avais réussi à trouver une nouvelle famille, et la voilà qui éclate et se dispatche. Je sais. Je sais. Ça va s’arranger. Je me le répète à longueur de temps, ça marche pas des masses… Sans parler que Sid avait réussi à prolonger sa peine je ne sais comment cet abruti. Sérieusement, il pense vraiment qu’à sa gueule quand même. Ouais, je suis injuste, je sais. Mais c’est abusé.
Mais Luke lui, il est sorti. Lui, on l’a vu. En dehors de la prison, dans le jardin. On a pu lui faire un câlin, oui, j’en ai profité un peu, et parler avec lui. Il avait l’air un peu à l’ouest, normal je pense après tout ça, et j’ai essayé de rester un peu à l’écart, après tout Robin avait le droit de passer du temps avec son frangin après tout ce temps… Et puis, il a facilité le truc, il… je sais pas, il m’évitait presque du regard, comme si j’avais fait un truc qui lui plaisait pas. Ouais, j’ai testé les dégradés roses, violets, bleus dans les cheveux, mais ça peut pas être ça, pas vrai ? Enfin, j’étais contente quand même, et puis, il a dit qu’il allait revenir et qu’on trouverait une solution. Une solution pour se barrer hein ? Parce qu’ils veulent plus de lui ici, alors on peut pas rester, ils sont tous partis, on peut les rejoindre non ? Robin est d’accord, donc ça peut être que ça.

Je souris à cette idée, un vrai sourire, et je me dépêche de sortir du bus pour rejoindre la maison. Parce qu’il devrait être là. Je fais le tour de la maison et je stoppe malgré moi, la main sur la poignée.

« … Bon, très bien. Je passe la récupérer à la fin de la semaine. Je l’emmène et vous entendrez plus parler de nous. »

Et mon cœur s’arrête. La ? Juste… elle ? Juste Robin ? Non, ils ont pas le droit. Ils peuvent pas faire ça. Ils peuvent pas me laisser. Je peux pas rester seule. J’y arrive déjà plus. Et je grimace alors que le plancher grince quand je recule. Merde, je peux même pas me sauver. Alors j’inspire et chasse mes larmes, mes mâchoires se crispant quand je pousse la porte. Tous les regards se tournent vers moi. Laura et Arthur. Luke.

« Salut. » Je souris. « J’ai eu un B en chimie ! Et un A en art. C’est cool hein ? »

« C’est pas mal. Et le dessins, ça sert à rien, on te l’a déjà dit. » Elle se lève et débarrasse le café et le gâteau. « Va faire tes devoirs, t’as les animaux à nourrir, et y a du repassage à faire. »

Je hoche la tête, j’ai déjà essayé de pas répondre et vaut mieux pas, et elle sort de la pièce, non sans que j’ai réussi à voir la petite étincelle de victoire dans son regard. Ne pleure pas. Arthur sort à son tour, et lui, j’essaie d’ignorer son regard. Je l’aime pas. C’est pire depuis qu’Axel est partie… Et il ne reste que lui.

« Salut gamine. C’est cool pour tes notes, je suis fier de toi. » Il me sourit, d’un sourire forcé, et toussote. « Il va falloir qu’on discute. »

Je baisse la tête et inspire profondément, avant de le regarder à nouveau.

« Pas la peine, j’ai entendu. Je comprends. C’est cool qu’ils aient dit oui pour Robin.
J’ai du boulot, faut que j’y aille. On discutera une autre fois. »

Et je passe à côté de lui, sans le regarder, sans m’attarder, alors que mon cœur tambourine à tout rompre dans ma poitrine. Ça fait tellement mal. Je veux pas rester. Je veux pas être seule. Mais ils sont plus là. Ils sont tous partis. Ils m’ont juste laissé derrière.


Soufflant sur mes mains pour tenter de les réchauffer, je me répète le millier de bonnes raisons qui m’ont poussé à être ici. Enfin, je suis pas vraiment sûre qu’elles soient bonnes, mais je pouvais pas faire autrement. Pas après que sa main soit arrivée sur ma cuisse, pas après ce sourire. Je veux même pas savoir ce qu’il pourrait faire, jusqu’où il irait, et je peux le dire à personne, alors quoi ? Et puis bon, c’est pas comme si je pouvais espérer autre chose. Ils ont eu beau dire, ils auraient pas pu me sortir de là, et même Luke m’évitait à la fin, il venait même plus me voir, alors si même lui…
Et puis, je suis pas partie les mains vides. J’ai récupéré mes fringues, quelques trucs et l’argent qu’ils planquaient et dans le pot de fleurs du salon et dans le bouquin en haut de l’étagère de la cuisine. Genre on ignorait ça… bref. J’avais un peu de tunes. Sauf que c’est vite parti ouais. Et je dirais jamais, mais genre jamais, comment j’ai fait pour ne pas mourir de froid et de faim dernièrement…

Je sais, je suis totalement conne. Ils ont dû s’inquiéter, ils doivent encore s’inquiéter. Enfin, certains. J’aurais dû les prévenir, leur dire, les rassurer, sauf que… sauf qu’ils m’auraient convaincus de rentrer, et je voulais surtout pas, sauf que je leur aurais attiré des problèmes, c’est sûr et certain, et ça, je voulais encore moins. Peut-être qu’ils me pensent morte depuis le temps. Ça fait quoi ? Quelques semaines, quelques mois maintenant ?…oui, je m’en veux, horriblement, mais je pouvais pas. Ni rester. Ni aller les voir. Pas après tout ça, pas comme ça. Donc oui, ils doivent s’inquiéter. Mais… Enfin, pas tous comme dit. Parce si j’avais réussi à obtenir je ne sais comment le lieu du circuit où s’entraînait Luke justement, et à m’y rendre, une fois sur place, ça avait été la douche froide. Je l’ai même pas approché. Il avait l’air d’aller bien, à rire autant, avec cette jolie blonde au bras, à lui rouler une pelle avant de rejoindre sa moto. C’était aussi une idée à la con. Je sais même pas pourquoi j’étais allée là-bas.

Alors j’ai fait demi-tour. Je me suis débrouillée seule jusque-là. Je peux continuer.


Je me retrouve le nez levé vers l’appartement allumé qui me fait face. Sous la flotte. Parce que ce serait pas assez mélo sinon. Et ouais, j’aurais pu venir tout de suite ici, ça m’aurait évité bien des emmerdes et des inquiétudes pour eux sans doute. Mais alors quoi ? Les flics seraient passés, ils m’auraient récupéré et… Non, non je pouvais pas. Et plus le temps passait, moins je pouvais débarquer la bouche en cœur. C’est vrai, ça se fait pas hein ? Je sais, partir sans donner de nouvelles, ça se fait pas non plus.
Même maintenant, je suis pas sûre que ce soit une bonne idée. Okay, j’ai trouvé un pseudo travail correct, que je peux donc leur mentionner, qui, même s’il paie pas des masses, ça me permet de manger au moins, me plait et est super cool. C’est cool non de dessiner pour un salon de tatouage ? Ouais, évidemment que ouais. Mais je me trompais. Seule, je peux plus. Je veux vraiment plus.

Je redresse les épaules, traverse la rue et arrive à me faufiler dans l’immeuble en même temps qu’un habitant. Et c’est d’une main tremblante que je sonne. Les yeux rivés sur mes pieds, j’ai un rire silencieux, sans joie, en me disant que je dois avoir une dégaine à faire peur. Des boots montantes, un collant noir, un short rouge et noir, un t-shirt licorne planqué sous une doudoune militaire trop grande, je dois un peu ressembler à rien. Surtout avec les cheveux multicolors qui dégoulinent par terre et mon baluchon par terre. Je relève lentement les yeux quand il ouvre la porte.

« … Euh… salut ? »

Et j’ai pas le temps d’en dire plus qu’il me serre contre lui. Mon cœur s’accélère, mais non, je peux pas craquer. Pas tant que… Il me fait entrer chez lui et je stoppe au bout de deux pas. C’est trop beau. Trop grand. Trop propre. J’aurais jamais dû venir. Sauf que je suis là et qu’il me dévisage, attendant visiblement que je parle. Ouais, Drew, il est pas con, c’est pas en m’assommant de questions ou de reproches que je vais y arriver.

« Je… euh enfin… C’est joli chez toi. »

Je me mords la lèvre, sans bouger.

« Enlève ton blouson et va t’asseoir. T’as faim ? J’étais en train de me faire à manger… »

J’ai pas le temps de répondre que mon ventre décide que mentir c’est mal, et gargouille à en faire trembler les meubles. Et ça le fait rire. J’esquisse un sourire contrit. Il m’observe et s’approche, me prenant à nouveau dans ses bras.

« Tu vas bien. Ça va aller… Tu devrais aller prendre une douche, et c’est pas pour dire que tu pues, mais ça te ferait du bien, t’as l’air gelé. Je te filerais des vêtements secs, okay ? »

Je lève la tête et son sourire tout doux a raison de moi et des larmes qui débordent alors que je hoche la tête.
Et il a raison. Ça va aller. Axel et Robin sont là quand je sors, j’ai pourtant pas l’impression d’être restée une heure, mais… elles sont là. Et elles m’engueulent, et pleurent, et me prennent dans leur bras. Et putain, ça fait plus de bien que je saurais jamais le dire. Et si lui est pas venu, s’il a mieux à faire, tant pis. J’ai pas besoin de lui. Après tout, je les ai eux trois.


A quel point je peux les croire ? Quand je vois tout ce qui se passe ? Quand je vois le nombre de fois où on a dû courir, se planquer, s’aider ? Quoique c’est pas une question de les croire ou non. J’en suis déjà persuadée, c’est obligé. Sid va bien. Je sais pas trop comment, mais je sais qu’il va bien. Même s’il était en prison quand les morts sont revenus à la vie. Ouais, ça me donne envie de rire aussi. Sauf que c’est vachement moins drôle quand tu te retrouves nez à nez avec l’un d’entre eux la première fois. Ni les fois suivante, mais la première fois, c’est juste horrible. Parce que c’est un être humain. Ou ça l’était. Et que ça l’est plus. Ça y ressemble, comme une poupée glauque et vide… qui essaie de vous bouffer. Heureusement que j’étais avec Drew, si j’avais encore été dehors, je… Bah je serais en train de hanter les rues et j’aurais peut-être essayé de les bouffer… Beurk. Non, je l’ai dit et le redis, jamais, jamais, jamais. Une balle dans la tête et paf.
Hum. Ouais bon.

Si je commençais à me sentir mieux, de nouveaux entière ou presque en les retrouvant, tout ce merdier à tout foutu en l’air. Parce que Sid est pas là et que je sais même pas comment il va. Et ça me bouffe. J’arrive pas à dormir, ou par à-coups, ce qui fait que je suis épuisée. Et d’une humeur de chien. Pire que d’habitude. Bon, c’est souvent le même qui prend, donc c’est pas très grave. Il se conduirait pas comme un con, je serais moins chiante. Il aurait été moins con tout du long, je lui en voudrais pas autant. Parce que non seulement j’ai perdu Sid, même si okay on va le retrouver, mais bah je l’ai perdu lui. Peut-être qu’il a réalisé en prison qu’il avait déjà une petite sœur, qu’il avait pas à s’embarrasser d’une autre gamine. Peu importe la raison. On était super proches, on l’est plus, je m’y suis faite. Ou pas. Et donc je suis en colère et je lui en veux. Mais c’est de sa faute.

Et ils avaient raison. On a fini par le retrouver. Entier. Vivant. Je sais pas trop comment on a fait. Il y avait tellement de monde, de morts partout. C’était tellement effrayant. Mais il est là. Avec nous, avec moi. Si on est ensemble, tout ira bien non ?


On a quitté Détroit, et heureusement on l’a fait dès qu’on a récupéré mon idiot de frangin. Même pas parce qu’il y avait des morts à chaque carrefour, quoique c’était la raison à la base, mais parce que ces tarés ont balancé du napalm sur la ville. Vous avez déjà vu l’effet du napalm ? C’est genre une énorme boule de feu qui bouffe tout sur son passage. TOUT. "Le napalm c'est bon c'est chaud, et en plus ça colle à la peau" qu’il disait dans l’autre film-là… J’ai entendu le hurlement de certains survivants par-dessus le souffle des explosions. Vous imaginez ça ? A vous glacer les sangs. Et j’ai recommencé à ne pas dormir. Et j’arrive pas à dormir seule. Genre pas du tout, parce que les cauchemars emplis de cadavres qui surgissent de nulle part et m’attrapent se partagent la vedette avec ceux où je les perds. Et je ne sais pas ce qui est le pire. Alors je dors avec Sid ou n’importe qui, serrant Guimauve, ma super peluche Hello Kitty version rock, contre moi comme un rempart contre les forces du mal. Autant dire que ça marche pas des masses. on s’y fait à force, à ne pas dormir plus de quelques heures, on s’adapte. Faut bien.

On bouge sans cesse, sans trop s'éloigner trop pour autant de Détroit, on reste rarement plus de deux nuits au même endroit. Et on essaie de trouver des maisons vides, parce qu’il fait quand même super froid, dormir dehors, c’est juste impossible, même serrés les uns contre les autres. Et on pille. C’est moche ouais, mais bon, en toute honnêteté, je m’en cogne complètement, et c’est pas pire que rentrer dans une maison par effraction pour y dormir. On trouve à manger comme on peut, et parfois on a de la chance, on arrive à trouver assez pour pouvoir stocker un peu et emmener quelques trucs. On s’en sort. Je dirais pas bien, mais on meurt pas totalement de faim pour le moment.


Des silhouettes au loin. On en a aperçu parfois, on les a évités toujours. Surtout quand elles semblaient agir ensemble, de manière coordonnée. Humaine. Oh, on peut pas savoir, peut-être qu’ils sont gentils, sympas, ces humais vivants. Peut-être pas. Dans le doute, on agit sur le même principe que "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.", mais sans les tuer. Enfin, c’est le principe de base. On est six, on s’en sort à six, parce qu’on se connait et qu’on a une confiance aveugle dans les cinq autres. Oui, même en l’autre-là. Les autres, c’est juste du danger supplémentaire.
Au moins, les morts, on a appris à gérer. Ils sont prévisibles. Ils restent dangereux, mais y a pas de surprises, de fausses joies ou de couteau planté dans le dos. Juste des griffes et des crocs ouais… A force, on a tous appris à se débrouiller, à se défendre contre eux. Et à les tuer oui.
Silencieusement, parce que le bruit les attire ces merdes. Alors en silence, ça laisse pas beaucoup le choix. Et laissez-moi vous dire que la première fois que vous avez un de ces trucs qui vous agrippe et essaie de vous bouffer, vous faites pas la fière. Bon, même maintenant, j’ai toujours le cœur qui semble vouloir s’échapper. Mais au moins, je n’ai plus les mains qui tremblent. Et je ne vomis plus. Je progresse. Je suis pas sûre que ce soit une bonne chose en soi, mais je m’adapte. On s’habitue à tout. Même à éclater le crâne d’un mec à coup de batte. Et faut s’y prendre à plusieurs fois en général, enfin moi en tout cas, avec ma force d’oiseau mouche… ça reste dégueu. Entre le bruit et les éclaboussures, c’est immonde. Au couteau, ça l’est déjà moins, mais, ça veut dire être carrément au corps à corps… et non, non, autant éviter.

Là, je sais pas, je cherche même pas à savoir s’ils sont vivants ou morts, je tourne et m’engouffre dans la petite ruelle avant d’être vue. Enfin, j’espère. Y a plus qu’à croiser les doigts que la porte de derrière soit ouverte, que le salon soit vide, que je trouve mon bonheur, que j’arrive à rentrer au camp sans encombre. Ça fait beaucoup de conditions… mais ça va aller. Y a intérêt sinon ils vont me tuer. Déjà qu’ils vont me pourrir d’être partie seule… mais c’est pas loin. Et je suis vachement plus discrète toute seule. Et je vais pas les mettre en danger pour ça. Je sais, c’est un peu moisi comme raisons. J’avais besoin de prendre l’air, c’est tout.
Et je vais juste chercher du gel colorant, j’en ai vu dans la vitrine… et du shampooing, ça fera plaisir, et du bien, à tout le monde. Je sais. C’est idiot de risquer autant pour ça. Mais je sais pas. J’ai besoin de me raccrocher à ces petits trucs. Des détails, des éléments de notre vie d’avant.
Et puis, vu l’état de mes cheveux, ce sera pas du luxe. Pas que je sois superficielle, loin de là, c’est juste… que je me sens pas moi. C’est bizarre je sais. Mais ça va aller. Je serais rentrée avant qu’ils ne s’aperçoivent de mon absence. Promis.

Bienvenue du côté obscure de la Force, mon jeune ami !
Maintenant que tu as passé la dure épreuve de la fiche, tu vas pouvoir enfin t'amuser parmi nous. Enfin... Après avoir fait encore quelques petites choses indispensables que voici :

• Tout d'abord, il faut que tu ailles recenser ton avatar dans [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] et ton métier dans [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], afin de rester quelqu'un d'unique !
  
  
• Afin qu'il soit plus facile pour les autres joueurs de te proposer des liens ou des rps et de rester à jour sur ceux que tu as déjà, pense à créer ton [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], qu'il faudra poster dans la partie prévue à cet effet selon le groupe auquel tu appartiens ! Il y a un code mis à ta disposition si tu en as besoin, mais la présentation de ce sujet est entièrement libre alors amuse-toi !
  
  
• Tu peux aussi créer un scénario si tu en as besoin, dans [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], mais sache bien que tu n'as pas le droit d'en proposer plus de deux en même temps, alors choisis bien
  
  
• Enfin, comme tu peux le voir, nous avons un système de points sur le forum et tout ce que tu dois savoir à ce sujet se trouve [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien], prends donc le temps de lire tout ça au moins une fois pour être sûr de ne rien oublier !
  
  
• Et surtout n'oublie pas que peu importe que tu sois là depuis un jour ou un an, tu peux contacter le staff à n'importe quel moment si tu as besoin d'aide pour quoi que ce soit concernant le forum. Alors n'hésite surtout pas !