Ezra était un peu perdu, il restait planté là, comme un piquet, se demandant ce qu’il allait bien pouvoir faire, si Will ne voulait plus lui parler. Mais quand ce dernier lui demanda de l’aide pour aller s’allonger, le tatoué s’exécuta sans attendre.

« Oui … Will. »

Ezra s’approcha de lui et lui tendit le bras pour qu’il s’appuie dessus. C’était de sa faute si Will était aussi diminué, s’il ne l’avait pas autant malmené… et si ce dernier mangeait un peu plus, il serait sans doute en meilleur état. Mais il ne pouvait pas lui en vouloir étant donné que lui même refusait de se nourrir quand il était à sa place. Il l’accompagna jusqu’à son lit, l’aidant à s’installer comme il fallait. Il secoua un peu la vieille couverture qui lui était mise à disposition et en couvrit Will alors que ce dernier se recroquevillait. Le tatoueur allait s’éloigner pour se poser dans un coin et attendre une heure correcte pour sortir, quand il attendit Will lui demander de s’allonger près de lui.

Ezra fut surpris, et resta connement debout à côté du lit de son ex-ami. Pourquoi lui demandait-il ça ? Lui qui lui avait tellement de mal ? ... Finalement peut-être que ça avait marché et qu’il allait finalement se résoudre à les rejoindre ? Le cœur d’Ezra se réchauffa à cette pensée, mais au fond de lui il éprouvait toujours ce même malaise qui lui faisait dire que ce n’était vraiment pas bien ce qu’il faisait, même pour gagner l’amour de Maryse, qu'est-ce qui lui donnait le droit de frapper Will. Il n’avait pas le droit de torturer quelqu’un pour s’acheter un peu de bonheur auprès de sa nouvelle mère, il était idiot de faire ça. Puis, alors qu’il était un peu perdu dans ses pensées, son compagnon d’infortune lui demanda de le prendre dans ses bras.

Sa surprise ne faisait qu’augmentait, mais Ezra ne le fit pas attendre plus, il se glissa délicatement sous la couverture qu’il venait d’installer quelques secondes auparavant. Était-il vraiment légitime pour lui offrir cette étreinte réconfortante ? Il n’en savait rien … Et toutes ses questions sans réponse commençaient réellement à le miner. Alors qu’il ouvrait ses bras pour aller enlacer Will, il se rendit compte qu’il se sentait plus à sa place ici, contre Will, que dans les bras de Maryse. Mais pourquoi ce sentiment ? Qu’est-ce qu’il se passait dans sa tête pour qu’il doute de chaque secondes de son existence ? Lui qui n’avait jamais eu ce problème de doute constant … Lui qui aimait tellement Maryse ...

Il se blottit contre son ami et le serra fort. Il le serra comme s’il n’y avait que lui qui comptait, comme s'il était la seule chose à le raccrocher encore un peu à son ancienne vie, comme si, finalement, il avouer que les bras de Maryse n’était pas assez bien pour lui, qu’il méritait mieux, qu’il méritait un homme qui l’aime vraiment et une vie plus douce, sans violence … Qu’il méritait autre chose que ça …
Il garda Will contre lui, autant que ce dernier l’accepterait, il avait envie d’arriver à lui redonner un peu d’espoir, mais là, à cet instant, il ne savait plus comment faire. Il comprenait que Maryse ne lui suffirait jamais pour remplacer Elias et que lui non plus ne comblerait jamais le gouffre qu’avait laissé son amoureux en mourant.

Ezra voulait qu’au moins pour aujourd’hui Will s’endorme dans la chaleur d’un tiers, qu’il repense à Fort Hope et à Elias, aux moments de bonheur qu’ils avaient eu tous les deux, de leur rencontre sous l’orage, aux crises de jalousie mal placée, en passant par les moments sous les draps, remplit d’amour … Une vie que le tatoueur aurait voulue connaître, mais qu’il n’aurait finalement jamais. Alors il fallait que Will s’en souvienne et soi conscient de la chance qu’il avait eu de connaître ça. Le cœur d’Ezra s’emballa, et il faisait tout pour retenir ses larmes. Il ne voulait pas alourdir un peu plus la peine de ce dernier, alors qu’il faisait tout pour essayer de lui remonter le moral, obéissant à ses moindres volontés.

Ezra se mit à chanter très doucement une vieille chanson qu’il connaissait… d’une française il lui semblait … se rappelant de l’accent si particulier et des quelques mots dans la langue de Molière glissés si parfaitement dans les paroles, qui donnait un charme incontestable à cette chanson.

« Hold me close and hold me fast, the magic spell you cast, this is la vie en rose. When you kiss me, heaven sighs and though I close my eyes, I see la vie en rose… »

Peut-être que Will pourrait s'endormir et plonger dans des rêves bien plus doux et joyeux que la noirceur qui l'entourait.