La journée s'annonçait fraîche ce jour-là, mais il fallait comme tous les jours bien s'occuper de Jack. Ne prenant pas mon courage à deux mains, je décidais de le faire plutôt en après-midi quand le soleil taperait un peu plus sur nous. Début d'après-midi, je laisse malheureusement Mark seul à la maison ne connaissant encore pas beaucoup de monde surtout de confiance. C'était risqué de laisser un enfant de 8 ans seul, mais je n'avais aucune idée de qui pourrait le prendre avec lui.

Généralement, il m'accompagnait voir Jack ce jour-là il en décida autrement. Je ne subissais pas à tous ces caprices loin de là d'ailleurs, mais bon il semblait aimer la solitude depuis la mort de ses parents. Ça faisait un bout de temps maintenant que je ne l'avais pas vu sourire une nouvelle fois. C'était assez dérangeant de voir autant de maturité chez un enfant de 8 ans. Il devrait faire comme tous les enfants de son âge.

-Je reviens dans peu de temps, fais attention à toi.

Le silence me répondit froidement, je n'aimais pas quitter la maison sans qu'il sache où je me trouve au cas où un éventuel problème surviendrait. Prise dans mes pensées, j'étais déjà devant le pré où se trouvait Jack. Du moins là où il était censé se trouver, je le cherchais frénétiquement du regard. Le vol était interdit au sein de Fort Hope, si ma mémoire était bonne.

Quand je le vis au coin de celui-ci, je fis un grand soupir. Je me faisais un petit mémo me disant d'arrêter de paniquer autant ça en devenait absurde. Enfin bref, je marchais le long du pré pour rejoindre l'animal. Un son me parvint cependant, une voix masculine certes, mais à qui? Je m'approchais un peu plus s'en me faire repérer, mais ne voulant pas surprendre cette personne et lui faire peur, je ne savais pas trop quoi faire.

La voix semblait tremblante et pleine de tristesse, peut-être même sur le bord des larmes. Les paroles qui sortaient de sa bouche n'était guère plus joyeuse, je m'avançais un peu plus pour me faire remarquer ne voulant pas effrayer mon hôte. J'eus la surprise de voir que c'était Ezra qui se trouvait là et qui papotait avec un cheval. Ma surprise devait certainement se lire sur mon visage et de toute façon il était trop tard pour revenir en arrière.

-Désolée, je ne voulais pas t'interrompre. Je voulais juste m'occuper de Jack, je ne penser pas que quelqu'un serait là.

Dis-je avec un petit rire nerveux, il avait l'air frigorifier ses lèvres d'un teint bleuté pouvait en témoigner. J'enlevais mon manteau et le lui proposait en le tendant vers lui. J'étais frileuse, mais il devait se trouvé depuis peut-être des heures dans le froid. Il en avait plus besoin que moi et ça se voyait. Je ne lui forcerais pas la main s'il n'en veut pas, je proposais c'est tout.

-Tu as froid non ?

C'était une proposition certes, mais j'imaginais Mark se trouvant dans le même état. Je le forcerais de la même façon quoi qu'il arrive. Si je me souviens bien il était de quelque peu mon cadet, à part ça je ne connais pas grand-chose sur lui. À vrai dire j'écoutais très rapidement les rumeurs, mais cela ne me faisait en aucun cas l'opinion de cette personne. Je préfèrais me faire ma propre opinion, même si c'est vrai que les rumeurs influencaient un peu.

-Pourquoi Caleb ? Désolée j'ai un peu entendu ta conversation... avec Jack.

Le jeune homme semblait effrayé, il refusa mon manteau ce qui m'inquiétait un peu sur le moment. Ça se voyait qu'il avait froid, pourquoi avait-il aussi peur de moi. Preuve du contraire je ne lui ai jamais rien fait intentionnellement, je me recouvrais les épaules avec l'offre qu'il refusa parce que si lui voulait attraper la mort et bien qu'il soit le seul. Je choisirais une autre mort, merci bien. Quand il me fit la réflexion sur le nom fut tout aussi étonnante, monsieur aurait apparemment sale caractère.

Heureusement pour nous deux, il s'excusa aussitôt. Il n'était pas de bonne compagnie, disait-il. Il n'avait certainement pas rencontré le petit Mark. C'était d'ailleurs la première fois depuis longtemps que quelqu'un ne m'avait pas adressé de cette manière, pas que je n'aime cette façon de parler non plus, mais si seulement Mark pouvait s'exprimer aussi facilement, je pourrais enfin comprendre pourquoi il ne me parle pas. Une histoire pour une autre fois certainement.

-Ne t'inquiètes pas, je ne le suis pas non plus.

Il s'approcha de moi ce qui m'étonna de plus bel et me dit son nom, Ezra. Je lui répondis, un sourire aux lèvres pour me montrer accueillante. Ses mains étaient glacées et l'inquiétude me glaçait littéralement les mains.

-Enchantée, moi c'est Amelia.

Apparemment, il ne se rappelait plus non plus de ce fameux Caleb, un homme lui aurait fait-il du mal ? Un homme du camp ? Serait-ce une dispute de couple ? Y aurait-il violences conjugales ? Le jeune homme semblait très mystérieux pour peut dire. Si je me souvenais bien, il n'y avait pas de Caleb au sein du camp, il devait forcément parler d'un passé plus ancien.

-Désolée, je ne t'ai pas présentée Jack, Ezra. Ezra, Jack.

Je tentais un brin d'humour pour peut-être essayer de le décrispé un peu. J'avais entendu parler de thérapie avec des chevaux pour "calmer" soi-disant les enfants généralement, bien que certains adultes aussi y soient passés. Le jeune homme en aurait fortement besoin et puis c'était également pour qu'il bouge un peu, à rester dans la même position dans un froid aussi glacial n'allait pas lui faire du bien.

-Tu veux m'aider ?

Je sortais la brosse de mon sac et la lui tendait. Il n'y avait pas besoin d'être magicien pour savoir comment brosser un cheval. Dans le sens du poil et on brosse, pas plus compliqué. J'allais retenter cette fois verbalement de lui donner mon manteau. Ce petit me faisait vraiment trop peur à se trimballer seulement en pull en plein hiver.

-Tu viens souvent ici ? Surtout quand il fait aussi froid, tu es sûr de ne pas vouloir mon manteau ?

-Tu vas voir c'est pas bien compliqué.

Je lui pris la brosse délicatement des mains pour ne pas l'effrayer et lui montra comment il devait procéder. C'est-à-dire dans le sens du poil, apparemment ce n'était pas une évidence pour tout le monde, mais j'étais prête à lui apprendre. Avec le sourire, je lui redonnais toujours avec délicatesse la brosse.

-Dans le sens du poil, comme je viens de te montrer. Tu vas voir c'est pas sorcier et surtout n'est pas peur d'appuyer un peu, tu ne vas pas lui faire mal, je te rassure.

Je partais de l'autre côté de Jack pour m'occuper de ces sabots. J'étais toujours inquiète par rapport à l'état dans lequel mon acolyte se trouvait. J'allais tout de même arrêter de lui forcer la main par rapport à mon manteau plus j'insisterais et moins il en voudra. Et puis j'eus une idée en tête, je pris mon celui-ci dans mes mains et le déposait à côté de la barrière. S'il devait avoir froid alors moi aussi, je regretterais certainement cette décision le lendemain quand je serais enrhumé.

-Tu m'as dit que tu dessinais, c'était quel genre de dessin ? Réalisme, fantaisiste ?

À part savoir dessiner des petits bonhommes en bâton, je n'étais pas très douée pour le dessin. Et je ne le suis toujours pas d'ailleurs. Me concentrant à moitié sur ma tâche, je regardais furtivement si Ezra parvenait à la tâche qu'il accomplissait.

-Mark sait bien dessiner également, il tient ça de ses parents. Il faudrait que je te le présente un jour, si ça te convient bien sûr.

Après tout il pourrait peut-être lui apprendre à dessiner et en échange je pourrais lui apprendre à monter en selle. D'ailleurs, était-il venu ici pour ça ? Avait-il eu vent que je prenais des élèves en apprentissage ?

-En y pensant étais-tu venu ici pour monter à cheval ?

Il me fallait un cavalier de toute manière, pour ne pas que Jack perde l'habitude d'être monté. Et puis ça le réchaufferait peut-être un peu, pas forcément que physiquement, mais mentalement par la même occasion.

-Tu étais dessinateur avant...

Je restais évasive et montrer les alentours avec ma main pour lui insuffler le mot 'avant toute cette horreur'. La vie d'avant, on a du tout abandonner, nos amis, nos familles, nos boulots et tous nos projets d'avenir. Maintenant on est strictement réservé à survivre comme on peux. Le mot trahison ou entraide, fait partie de notre langage commun et c'est par l'un ou par l'autre qu'on en est arrivé jusque-là aujourd'hui.