La journée s'annonçait fraîche ce jour-là, la neige avait légèrement tombée sur le sol de Fort Hope. Je comptais faire sa lecture quotidienne à Mark, après tout même après l'épidémie il fallait bien quelqu'un pour lui apprendre comment était le monde avant celle-ci. Il était assez débrouillard pour un enfant de son âge, cependant il parlait très rarement. J'avais peur chaque jour pour lui, il avait l'air de s'y être habitué à tout ce qu'il y avait dehors et pour être franche c'est ça qui me faisait peur. Je lui fis faire une dictée ce matin-là, dans le petit carnet que j'avais. J'essayais d'être une tante modèle.

Après notre leçon, il fallait bien qu'à un moment donné ou un autre nous allions affronter le froid dehors et en début d'après-midi c'est ce que je fis. Je pris Mark avec moi en le couvrant d'un manteau bien chaud et nous allions en direction du pré. Il fallait bien dire un petit bonjour à Jack et s'en occuper un peu. J'avais crée un cure-pieds improvisé, en réalité j'avais juste pris un couteau à beurre et lui curer les pieds délicatement pour ne pas blesser l'animal. Un aussi grand et lourd gaillard pouvait être si fragile quand on y pense.

Pendant que je m'occupais de ces sabots Mark lui avait trouvé une vieille brosse et s'occuper du corps de celui-ci. Enfin pour terminer, je lui mettais la bride et la selle et le voilà enfin prêt. J'abaissais les étriers et maintenant il me manquait juste un certain cavalier. Je regardais Mark qui ne semblait pas emballer ce jour-là. Ne sachant pas comment lui remonter le moral, j'essayais de me montrer un tantinet enthousiaste.

-Prêt à le chevaucher ?

Il marmonna quelque chose que mon oreille ne put entendre aussi bas, mais qui me semblait aussi pessimiste que mon moral en ce moment. Je l'aidais à monter sur Jack, il prit la bride dans ses mains et c'était parti pour la seconde leçon du jour. Il connaissait déjà l'entraînement à faire, au pas et puis au trot pour échauffer le cheval, c'est pour plus facilement resserrer la sangle en dessous du cheval. Sangle dont je ne me rappelle gère le nom d'ailleurs.

Je ne me sentais toujours pas d'attaque à remonter à cheval après mon petit accident, mais cela ne m'empêchait pas d'aider les autres à le faire. Il était assez grand pour un enfant de 8 ans, il arrivait à toucher les étriers, à peine. Il avait une bonne assise sur Jack, sa position était presque parfaite. Je n'étais pas non plus une pro niveau équitation, je me débrouillais c'est tout. Et puis bon, nos ancêtres on réussit à les dompter alors pourquoi je n'y arriverais pas non plus. Ça c'était la théorie, la pratique était quand même bien plus compliqué.

L'air frais sortait des naseaux du cheval abondamment et il était temps de réajuster cette fameuse sangle. Il était bien échauffer et prêt à être chevauché, heureusement pour moi, il était plutôt cool comme cheval et il se laissait facilement manier. J'ai eu un petit coup de poker en ayant le plus calme de tous, c'est tout.

Tout semble s'accorder pour former une journée bien complexe, mine de rien. Pessimiste que je suis, je ne peux m’étonner de constater que la neige est tombée. Je me rappelle sans grands efforts, les jours où j’adorais voir la neige tomber par la fenêtre. J’étais à cet âge encore enfant et la simple vision de quelques flocons me mettaient en joie. Mais depuis que j’ai mon permis, je fais partie de ces gens, qui râlent au moindre gèle à cause des routes verglacées. Pourtant, à l’heure actuelle, il est bien stupide pour moi de râler pour cela, car de toute évidence, ce n’est pas tous les jours que je conduis. Non, à l’heure actuelle, si nous survivants sommes en mesure de râler, c’est bien pour se plaindre des effets que cela produit. Les légumes, les fruits, les animaux, tout devient plus compliqué à trouver l’hiver venu. Je n’ai aussi qu’une hâte, que l’été ou au moins le printemps, arrive plus vite cette année. Ce qu’il y a de rassurant, c’est qu’au moins, maintenant la planète peut prendre tout le temps qu’elle veut pour évacuer les pollutions que l’humanité lui avaient jeté à la gueule. Peut-être est-ce parce que je suis bien obligée de faire d’autant plus attention à la météo en ce moment, mais je trouve que nos saisons sont de plus en plus marquées, comme elles devraient l’être normalement.

Arrêtant enfin de divaguer et de pester intérieurement contre chaque flocon qui osait tomber sur Fort Hope, je décide de m’habiller. J'enfile un haut, un bas, des chaussures et un manteau, avant de sortir dehors. Contre toute attente, il ne fait pas si froid que ça. J’aurais cru être face à la froideur mordante, et pourtant, je suis simplement face à une fraicheur matinale, qui en serait presque agréable. Je me balade doucement dans Fort Hope, jusqu’à ce qu’un bruit très singulier, que j’ai déjà entendu dans milles films, retentit. Je crois reconnaître en effet le son si particulier, le cataclope d’un cheval non loin d’ici. Mes pensées ne peuvent s’empêcher de virevolter jusqu’à Dean. On dirait qu’un cheval s’exerce. Curieuse et le plus discrètement possible malgré ma brusquerie si caractéristique, j’approche de l’endroit, où je perçois les bruits.

Finalement, ma quête aboutit devant une femme, qui fait monter un petit homme à cheval. L’enfant, ne semble pas spécialement heureux, je n’entends en tout cas aucun éclat de rire. Me concernant, je fixe la situation avec beaucoup d’attention. Monter sur ces canassons ne fut pas la meilleure expérience de ma vie, mais prétendre que cela serait la pire, serait un énorme mensonge. Dean m’a promis de m’apprendre à monter à cheval. Même si cela ne me dérangerait pas de l’avoir comme professeur, je pense que je pourrais prendre quelques leçons d’avance et le bluffer un minimum lors de notre prochaine rencontre. Je viens doucement m’appuyer sur un poteau non loin, avant de fixer l’animal encore un temps. Lorsque ce dernier repasse en trot, renâclant en faisant vibrer ses naseaux, je me permets enfin de signaler ma présence.

- T’es un genre de prof, je me trompe ?

Approche direct, franche. C’est tout moi, le tact ne me connaît que peu.

- Enchanté… T’es nouvelle par ici ? Je crois pas qu’on se soit rencontrées. Je m’appelle Alix Carter. Bienvenue.... Dis, tu donnes des cours pour apprendre à monter aux gens qui n’y connaissent rien et qui n’ont pas de chevaux ?

En sursautant, je me retourne pour me retrouver nez à nez avec une blonde. La couleur ne me dérange absolument pas, c'est juste que je ne sais pas qu'elle est son nom. La main sur ma poitrine, j'essayais de me concentrer sur la jeune femme en face de moi et ce qu'elle voulait.

-Tu m'as fais peur, je ne t'avais pas entendu arriver.

Elle me demande si j'étais "un genre de prof", je hochais la tête pour lui indiquer que c'était bien le cas. Elle me souhaita la bienvenue et me confirma qu'elle voulait en effet apprendre à monter.

-Enchantée également, moi c'est Amelia. Et pas de soucis, je peux t'apprendre ça.

Je fis un signe de la main à Mark quand il daigna me regarder pour qu'il revienne vers nous. Je le descendis de Jack, l'air toujours aussi triste qu'avant il alla s’asseoir sur un banc pas loin.

-Tu connais un peu les bases en équitation ou c'est ta première fois ?

En attendant sa réponse, je ne perdais pas de temps et resserrer cette fichu sangle. Une fois arrangé, je lui dis de venir à moi.

-C'est pas sorcier, tu montes toujours du côté gauche du cheval. Tu mets un pied à l'étrier et tu pousses pour amener ta jambe de l'autre côté. Et ensuite tu repositionnes les deux pieds dans les étriers. Tu ne mets pas tes pieds jusqu'au bout de l'étrier tu mets juste la pointe de tes pieds à l'intérieur au cas où le cheval s'emballe, qu'il ne t'embarque pas avec.

Elle était en train de grimper dessus, quand je me rappelais des règles les plus importantes, les règles strictement de base.

-Quelques règles de sécurité également, tu ne passes jamais derrière un cheval. Tu ne tapes pas dans tes mains comme une malade ou fait beaucoup de bruit étrange en quoi que ce soit. Si tu ne venais qu'à tomber, laisse-toi tomber si tu te crispes ça fait encore plus mal, mais je ne t'en voudrais pas si tu fais le contraire, c'est la première chose qu'on fait tous. Je crois que c'est à peu près tout, si je pense à autre chose je te préviens.

Enfin positionner sur Jack, je replaçais ses jambes correctement tout comme ses pieds, ses mains, etc... Je positionnais ma main sur son dos pour vérifier qu'il soit bien droit, mais pas trop tendu non plus.

-Les rênes tu les prends en main les pouces en l'air, toujours. Pour te diriger tu fais des mouvements de droite à gauche, mais rappelles-toi toujours les pouces en l'air. Pour faire avancer le cheval c'est facile, tu donnes un coup d'étrier de préférence le talon touche l'animal. Si tu veux l'arrêter tu tires sur les rênes, une nouvelle fois pas comme une malade, doucement, mais pas trop non plus.

Tu sais quoi la pratique avant tout, ça n'a jamais tué personne. J’espérais qu'elle aime le goût de l'aventure et du risque. Je prenais les rênes dans mes mains, positionnant Jack à l'endroit désiré et les lui redonna. Je fis un premier pas que Jack suivit et les voilà partis au pas.

-Au fait, lui c'est Jack.

Elle semble bavarde, ce qui me convient très bien. Je ne suis pas du genre l'occase, aussi, ça m’arrange presque qu’elle prenne soin de parler et d’expliquer, peut-être un peu trop de choses d’un coup, sans que je n’ai la moindre question à poser. Je ne voulais pas forcément monter aujourd’hui, simplement me renseigner. Mais j’ai envie de dire, que je ne suis pas spécialement occuper alors c’est le moment pour essayer, je suppose. Elle fait descendre le garçon qui était sur le cheval, chose que je trouve dommage. Je n’avais pas comme projet d’interrompre quoi que ce soit, mais en même temps, ce dernier ne semble ni ravi d’être sur la monture, ni ravi d’en descendre. J’essaye de ne pas trop le regarder, parce que bien souvent et bien malgré moi, j’ai l’air de dévisager les gens que je regarder trop fixement. Aussi, je la vois resserrer le truc qui passe sous le ventre du cheval, on dirait un genre de ceinture pour éviter que la selle ne glisse. J’approche prudemment, observant l’étrange truc qui pend en métal. L’étrier, si j’écoute bien le prof. Je glisse mon pied dedans et j’attrape la selle, me disant que la bestiole ne serait pas forcément contente si je lui arrachais ses poiles. Après un effort, je me propulse sur son dos, restant accrochée à la selle avec les sourcils froncés. Faut faire gaffe, parce que là, un poil plus fort et je tombais de l'autre côté. Je bouge doucement mon corps, pour m’installer plus confortablement. Je place les pédales, à mes pieds pas trop loin comme elle me demande. J’essaye d’être une élève attentive, mais ça fait quand même beaucoup de choses d’un coup tout ça. Il y a une chose qui est en revanche indéniable, c’est que c’est plus confortable d’être sur son dos, avec un truc entre mes fesses et sa peau. Monter à cru avait été sympas, mais très perturbant. Je sentais chaque muscle, chaque os bougé au rythme de ses pas…

Elle me touche un peu partout, un peu trop à mon goût. Elle vérifie que tout est bon, s’en est presque oppressant mais après tout, faut bien apprendre tout ça. Elle me donne les dernières directives, concernant la tenue des rênes. Je teste un peu la chose, bougeant doucement les manettes pour voir comment ça réagit au bout des cordes. L’animal bouge doucement la tête au rythme de mes gestes. Bon, on va supposer que c’est le guidon. Chose curieuse, il me semble aussi que c’est le frein ? Tout ça semble assez compliqué à mettre en place… Beaucoup de choses à faire en simultané. Finalement, le cours s’intensifie. L’animal se met à avancer, en suivant la fille au sol. Je me concentre, suivant les mouvements de l’animal avec douceur, me souvenant de ma balade à cru. Si on suit pas le mouvement qu’il fait, ça devient vite inconfortable. Le pas, finalement, c’est assez facile. Je dirais même agréable. Y a pas grand-chose à faire et c’est lent, on a le temps de le donner son ordre. Je ne dis rien, faisant tout de même attention de bien suivre ce qu’il se passe et hoche finalement la tête. Je suis très concentrée et surement grâce à la boxe, j’arrive à faire tout ce qu’elle m’a dit, me coordonnant bien dans mes mouvements. Le bémol est évidemment que je fais tout avec un peu trop de réflexion surement et un peu de lenteur. Même moi je sens que je suis un peu trop crispée. L’ennui, c’est que je ne sais pas qu’elles zones doivent être détendues ou crispées ?

- Bon… ça, je pense que ça va. Je suppose que c’est la partie la plus simple, pas vrai ?