A voir la façon dont Isha engloutit ce que je lui ai donné, impossible de douter du fait qu’il mourrait effectivement de faim, et de soif. Ce n’était pas grand-chose, et je ne tarderais pas à aller chercher davantage pour qu’il puisse manger encore un peu plus, et reprendre des forces. Parce qu’à voir comme il a du mal à s’extirper du lit, je ne doute pas un seul instant du fait qu’il ne va pas se remettre à gambader gentiment dès demain. Je hoche de la tête quand il me demande s’il a bien été conscient quelques jours, et le lui confirme, bien que je ne comprenne pas bien pourquoi il me le demande.

Je le vois se mettre debout avec difficultés, et m’avance déjà pour le prendre par la taille, sans tenir compte de sa nudité. J’esquisse un sourire à sa remarque, tandis que l’une de mes mains glisse dans le bas de son dos. « -Je pense que tu as déjà la réponse à cette question, vu que tu sais très bien que je ne laisserai personne d’autre s’approcher de toi, et encore moins s’approcher de toi dans un lit. » Non pas que je sois du genre jalouse, bien au contraire, mais je pense que tout le monde dans cette arène a intégré le fait que Isha et moi sommes ensemble, et qu’il ne semble pas utile de tenter de faire du rentre dedans à aucun d’entre nous. « -Et sache que tu gigotais tellement que je n’ai même pas pu te voler le moindre baiser… »

Un petit sourire en coin se dessine sur mon visage à sa nouvelle tentative d’humour, tandis que je me déplace sur le côté, pour glisser l’un de mes bras autour de sa taille, et l’aider à mettre l’un de ses bras sur mon épaule. « -Tu sais que tu peux tout me demander. Allez, appuie toi sur moi… » Et on avance à notre rythme vers la baignoire, avant que j’aide Isha à s’y installer, et à mettre de l’eau chaude à couler. Son corps est encore marqué de bleus et de coups, mais je préfère éviter de m’y attarder plus que nécessaire. Je vais chercher une petite bassine dans la salle de bain, et la remplit d’eau pour la verser sur les cheveux poissés de sueur d’Isha, et les laver sans qu’il n’ai besoin de faire d’efforts ou de lever les bras.

Je finis par escorter Isha vers le lit tant bien que mal, et il se recouche sans broncher, sachant aussi bien que moi qu’il a sans doute besoin de pas mal de repos supplémentaire pour retourner dans l’arène. Alors que j’étais sur le point de me redresser, je sens ses mains sur ma taille, et il m’attire contre lui, me faisant rejoindre le lit avec lui. Je ne lutte pas, et m’étends à ses côtés, glissant un bras autour de sa silhouette, tandis qu’il glisse son visage dans mon cou, et reste silencieux un moment. Ses cheveux trempés mouillent le haut de mon t-shirt, mais ça m’importe peu, et je dépose un baiser sur son front, avant de caresser doucement son bras, de haut en bas.

Le temps s’étire, et Isha ne bouge toujours pas, si bien que j’ignore s’il se repose, ou s’il s’est simplement assoupi. J’en viens moi-même à fermer les yeux, me disant que je devrais profiter du fait que je sois rassurée sur son état de santé pour remplir mes batteries et dormir, moi aussi. Mais je n’ai pas les yeux clos depuis plus de deux minutes qu’il finit par me poser une question qui me fait froncer les sourcils, et rouvrir les yeux. « -Joshua ? Hé bien…le fait qu’on soit encore vivants tous les deux en dit long sur le sujet, tu crois pas ? » Je glisse une main dans ses cheveux, à la base de sa nuque, et attends quelques secondes pour ajouter. « -Ne penses plus à lui, il ne peut plus nous faire de mal… »

Isha a fini par s’assoupir, s’affaissant de plus en plus sur mon épaule, jusqu’à ce que sa respiration soit un long filet d’air paisible, et que son corps devienne mou contre le mien. Je continue mes caresses un moment, sentant que malgré la fatigue accumulée ces derniers jours, pendant qu’il se débattait dans le lit face à ses cauchemars, je n’arriverai pas à dormir tout de suite. Je peine à me défaire de cette inquiétude qui me noue encore les épaules, et soupire légèrement avant de poser mes lèvres contre ses cheveux, fixant le mur face à nous. Joshua a beau être mort, je sais malgré tout que les prochains mois ne vont pas être de tout repos, à commencer par cet accouchement tant redouté qui pourrait finir de manière dramatique. Je ferme les yeux un court instant, secouant légèrement la tête pour chasser les images sanglantes qui s’impriment sous mes paupières. Ne plus penser à ça, ni maintenant, ni jamais.

Avec milles précautions, je glisse dans le lit pour m’y allonger à mon tour, et même dans son sommeil, Isha parvient à passer un bras autour de moi dans un geste protecteur. J’esquisse un léger sourire, tend le bras pour éteindre la lampe de chevet, et ne parvient pas à dormir pendant encore un bon moment. Le bébé semble répéter un ballet dans mon ventre, me rappelant sans cesse à mes angoisses qui ne trouvent pas de réponse, et le gladiateur dort déjà depuis quelques heures quand l’épuisement finit par l’emporter, me faisant fermer les yeux définitivement. Je dors d’un sommeil de plomb, sans rêve, rechargeant mes batteries après ces quelques nuits compliquées.

J’ignore l’heure qu’il est quand je sens de timides caresses sur mon ventre, qui m’arrachent peu à peu à mon sommeil. Encore ensommeillée, je pose ma main sur celle d’Isha, et esquisse un léger sourire, les yeux toujours fermés, l’accompagnant dans ses mouvements. J’ai l’impression qu’il me faut toute la volonté du monde pour parvenir à ouvrir mes paupières qui semblent peser trois tonnes chacune, et mon regard embrumé tombe sur le brun, alors que ma main se pose sur son front, heureusement frais. « -Ta fièvre a totalement disparu. Tu te sens comment ? » Mieux, je l’espère sincèrement, et même si j’adorerai passer quelques jours au lit avec lui, je suis certaine que Sam, Dean, Malou, ou n’importe qui d’autre ne tardera pas à venir le rappeler à ses obligations de champion, qu’importe son état de santé.

Ma main a retombé mollement sur nos draps, pile entre nos deux corps, et j’étouffe un long bâillement, tandis qu’Isha me dit qu’il va bien. Pendant quelques instants, je le considère d’un air sérieux, comme pour essayer de voir la vérité sur son visage, avant de laisser un sourire flotter sur le mien. « -T’es bien réveillé Bébé, alors autant t’y habituer ! » que je lui réponds d’un air provocateur, affichant le même sourire goguenard que celui d’un type louche dans un bar, qui essayerait d’emballer la nana pas fraîche au bout du comptoir. « -Tout ça est bien réel. Toi, et moi, bien en vie dans cette arène, et lui, ou elle… » Ma main se remet sur la sienne, alors que mon regard se pose à la dérobée sur cette bosse sous mon t-shirt.

D’ailleurs, en parlant de la bosse, Isha ne tarde pas à me demander comme nous allons, tous les deux. Je reste silencieuse un instant, le temps que toutes les angoisses que génère cette question se tarissent d’elles-mêmes. Et finalement, je finis par hausser les épaules : « -Je pense qu’on va parfaitement bien…même si on cracherait pas sur quelques heures de sommeil… » Je souris doucement, avant de m’étirer dans le lit comme un chat. « -Je voudrais jeter un coup d’œil à tes blessures. T’arriveras à te redresser ? » Il ne manquerait plus qu’il ai survécu à une horde pour qu’une blessure ne s’infecte, et vienne abréger prématurément sa vie.