Maya hocha la tête lorsque Malou lui dit qu'il y avait un type qui les tenait en joue. "Il n'est pas le seul..." murmura-t-elle. De sa hauteur, elle voyait au moins 8 personnes qui les tenaient en joue. Elles n'avaient pas encore tiré ce qu'elle jugea comme étant un bon signe. Pour autant, devaient-elles continuer à avancer ? Maya n'était plus sûre. Elle vit alors s'approcher une femme. A cause de l'obscurité, Maya ne parvenait pas à lui donner un âge mais elle se doutait qu'elle avait une certaine autorité au sein du camp de fortune. L'inconnue parlait avec beaucoup d'assurance dans la voix et semblait sûre d'elle. Maya se tourna d'abord vers Malorie attendant des consignes. Puis, elle leva alors un peu plus haut les mains pour montrer que non, elle n'était pas armée. La jeune esclave décida que ce qu'elles auraient bien le temps de décider après de ce qu'elles leur diraient. Pour le moment, l'essentiel était de gagner leur confiance et que la jeune femme devant elle, les laisse rentrer. Elle répondit à l'inconnue d'une voix basse : "Laissez-nous rentrer, il semblerait que nous ayons un petit problème en commun..."

Elle insista alors devant l'hésitation de la jeune inconnue. "Nous ne vous voulons aucun mal, nous ne sommes que deux..." dit doucement Maya. Son regard passait de la femme inconnue aux tireurs embusqués. Elle surveillait chacun de leur geste. S'ils venaient à tirer, elle voulait s'assurer d'être prête et de pouvoir mettre Malorie en sécurité même si, honnêtement, si'ls commençaient à tirer, elles n'avaient quasiment aucune chance de s'en sortir... Il aurait fallu que les tireurs ne sachent pas tirer... Elle adressa un petit regard à Malorie pour voir si elle devait continuer dans cette voie-là. "Nous ne pouvons pas discuter de ça ici... Fouillez-nous, vous verrez que nous ne représentons aucun danger..." Maya fit glisser sa main dans son dos et sortit son arme. Avec des gestes calmes et doux, elle la posa à ses pieds pour montrer ses bonnes intentions.

Cette journée ne finirait jamais assez vite. Si elle n'avait pas cet insupportable instinct de survie, Anna se serait débrouillée pour qu'un militaire lui tire dessus et mette fin à ses souffrances. Au lieu de ça, elle se pencha sur son faux frère du jour et attacha les menottes à ses poignets en murmurant des insultes à l'adresse des soldats à voix basse et inintelligible. Elle vérifia que son oeuvre était irréprochable en tirant fermement sur les bracelets métalliques et leva les yeux vers le type un peu bizarre qu'on lui avait affublé comme seule famille aujourd'hui. "Est-ce que ça va ? Ils t'ont pas fait trop mal ?" demanda-t-elle, avec quelque chose dans la voix qui ressemblait presque à une sincère inquiétude. Presque. Elle l'aida à se redresser et à s'asseoir un peu plus dignement. Il semblait carrément secoué, peut-être même un peu dérangé psychologiquement et elle n'aimait pas ça du tout. Malheureusement, elle n'avait le choix qu'entre le mini-dingo ou les soldats... "Faut qu'on se sorte de cette merde, t'as pas une idée brillante ?" demanda-t-elle en se penchant à son oreille en lui faisant un espèce de câlin bizarre qui lui donna des frissons. Mais bon, c'était son frère, pas vrai ? Et au moins, comme ça, aucun soldat ne pourrait la voir parler.

Les yeux de Maya étudiaient l'obscurité. Elle repera une vingtaine de personnes qui les observaient. Difficile de voir, de là où elle était s'ils étaient armés ou non. La femme inconnue accepta de les laisser rentrer mais avec deux conditions : qu'elles laissent leurs armes dehors et qu'elles se déshabillent pour voir si elles n'avaient pas été mordues. "Génial..." murmura Maya. Cette demande ne l'étonnait pas vraiment. Dans d'autres groupes qu'elle avait côtoyé, ils procédaient de même pour s'assurer de ne pas laisser rentrer un potentiel futur rodeur dans leur rang. Elle laissa échapper un soupir bruyant avant d'enlever son haut puis son pantalon. Elle s'arrêta là, refusant de se montrer complètement nue devant une vingtaine d'inconnus. Elle n'avait pas honte de son corps, là n'était pas la question, c'était plus par fierté. Elle leur lança ironiquement : "Vous inquietez pas j'ai pas l'habitude qu'on me morde les fesses..." Et puis, il suffirait que les militaires décident de lancer une attaque à ce moment-là et qu'elles doivent se battre complètement nus... Non merci, vraiment... Malorie leur dit qu'elles venaient de l'arène. Maya doutait que ce soit une bonne idée, l'arène ayant pas forcément une très bonne réputation au sein des groupes isolés. Mais bon c'était trop tard.

 "Tu as besoin d'aide ?" souffla-t-elle à Malorie qui, de toute évidence, ne pouvait pas enlever son pantalon seule comme ça assise dans son fauteuil en pleine rue sans rien pour l'aider. Maya laissa l'inconnue se rapprochait pour les détailler et vérifier qu'elle n'avait pas de morsure quelconque sur le corps. La jeune esclave resta patiente, silencieuse, ne faisant aucun geste brusque pour ne pas alerter les gens du camps. Plus cette histoire avançait et moins elle sentait un dénouement heureux se profiler. Les gens de ce camps ne lui paraissait pas dangereux. Elle se tourna vers Malorie, lui demandant du regard si elle avait une idée là maintenant... Malheureusement, elle se doutait qu'elles ne pourraient faire mieux que suivre ce que leur dirait la femme inconnue...

A l'évocation du statut officiel de Malorie, Maya tiqua. En effet, comment ces femmes pouvaient être au courant de ce détail et connaitre le visage de la jeune femme ? Cette dernière semblait tout aussi surprise que Maya. Toute cette histoire était décidément bien étrange. Dès qu'elle eut ses vêtements, Maya s'empressa de se rhabiller. Il faisait froid et en sous vêtements, elle n'était pas des plus à l'aise devant des inconnus. Elle aida également Malorie à se rhabiller. "Alors, vous connaissez l'Arène ?" demanda prudemment la jeune esclave à la femme inconnue.

Malorie jeta un coup d’œil à Maya et cette dernière prit la parole : "On va faire simple. Des militaires sont venus nous chercher ce matin à l'Arène sans qu'on leur demande quelque chose. Ils ne nous ont pas laissé le choix et nous ont emmené ici, derrière ce bloc de bâtiments. Leur consigne est de vous arrêter car vous seriez des rebelles." Maya s'arrêta. Mieux valait être honnête. La jeune esclave ne pensait pas que les militaires souhaitaient vraiment les arrêter mais plutôt les tuer, mais mieux valait mesurer ses propos. Elle attendit quelques secondes pour voir la réaction de la femme inconnue. "On a pas l'habitude d'agir sans connaître le fin mot de l'histoire mais une chose est sûre, ces mecs-là semblent bien décider à aller au bout de leur action. Est-ce que vous avez pu faire quelque chose pour les mettre en rogne ?"

En seulement quelques mots, Robin avait réussi à perdre le peu de fausse affection qu’Anna pouvait envisager de lui porter. Elle n’eut malheureusement pas l’occasion de lui faire savoir qu’elle ne respectait absolument pas ses sous-entendus écoeurants que quelqu’un l’empoigna pour la remettre sur ses pieds. Par réflexe, elle essaya de se débattre un peu, mais ce ne fut d’aucune utilité pour empêcher plusieurs hommes bien mieux nourris qu’elle de lui passer les menottes et de la balancer sans ménagement à l’arrière de la camionnette, où ils n’auraient plus aucune chance de garder un oeil sur les autres membres de leur équipage. Elle s’en inquiéta un bref moment, jusqu’à ce qu’elle ne se rende compte qu’un vrai problème risquait de se poser ici aussi. Tant pis pour les autres, elle ne les connaissait même pas vraiment, de toute façon. Toute son attention se posa sur l’homme en treillis assis face à eux et à sa question pour le moins… perturbante ? C’était elle, la soeur Cornwell aujourd’hui, non ? Si ce mec savait depuis le début qu’ils se foutaient d’eux, pourquoi n’avoir rien dit avant maintenant ? La situation devint d’autant plus perturbante lorsque deux événements encore plus inattendus se produisirent à quelques secondes d’intervalle. Tout d’abord, ce crétin de militaire pointa son flingue sur les genoux d’Anna pour lui mettre un bon petit coup de pression. Elle prit sur elle de conserver un air neutre vaguement ennuyé avant de répondre à sa question très lentement, en détachant chaque mot comme si elle s’adressait à quelqu’un ne comprenant pas très bien l’anglais ou juste un peu retardé. “Je. suis. La. soeur. Cornwell.” Ce fut plus ou moins à ce moment-là qu’elle sentit la pression sur ses poignets disparaître d’un coup et que toute forme d’inquiétude l’abandonna pour de bon. Elle dut se mordre les joues pour ne pas se mettre à sourire comme une idiote et gâcher son effet immédiatement. Elle ne parvint pas à ravaler son sursaut quand son idiot de faux frère hurla qu’il allait tout avouer. À quoi il jouait, cet abruti ? En moins de trois secondes, Anna pouvait prendre le militaire en joue et même les sortir de là si les dés du Destin jouaient en sa faveur, alors pourquoi fallait-il qu’il vienne tout gâcher en parlant ?! Elle lui jeta un regard meurtrier qui se décomposa peu à peu en regard éberlué alors que l’idiot de l’Arène se mettait à raconter des bêtises plus grosses que lui. Le bon côté dans tout ça, c’était que le soldat ne lâchait plus son crétin de “frère” des yeux. Parfait. Plutôt que de prendre le temps de réfléchir vraiment à son plan, Anna secoua les poignets et se débarrassa de ce qu’il restait des menottes et, dès que ses mains furent totalement libres, elle fit un bond en avant en attrapant le canon du flingue pour essayer de s’en emparer tandis qu’elle se jetait sur le soldat dans l’espoir de lui compliquer un peu les choses.

Maya ne loupait rien à tout ce qui se passait autour d'elle. Elles pénétrèrent dans un camp de fortune où la misère régnait. Non, tout le monde ne pouvait vivre dans des endroits tels que l'Arène. En voyant cela, Maya comprenait mieux que certaines personnes acceptent de devenir esclave à l'Arène et avoir un niveau de vie un peu meilleur que celui qu'ils avaient à l'extérieur. Ce n'était pas le cas de Maya pour qui la liberté n'avait pas de prix. Depuis l'apocalypse, elle avait vécu dans de tels camps sans que ça ne lui pose le moindre soucis. Le confort était un luxe qu'elle avait vite renoncé avec l'épidémie. Quand elle évoqua l'armée, Maya remarqua aussitôt que ça s'agitait dans la foule autour d'eux et la personne en face d'elle se tendit. Ces gens avaient donc déjà eu à faire avec l'armée par le passé. Ce fut alors que Malou eut un malaise. La première réaction de la jeune esclave fut de lui venir en aide mais l'inconnue fut plus rapide.

A ces paroles menaçantes, Maya écarta les bras pour montrer qu'elle n'était pas une menace. Elle sentait qu'une bonne partie de l'histoire lui échappait et elle n'aimait pas ça. Les militaires là, dehors, ne leur avait pas tout dit et cette femme en face d'elle, qui tenait Malou ne semblait pas vouloir lui en dire plus. Vu son air menaçant, Maya ne la sous-estimait pas une seule seconde. Ses prochaines paroles seraient cruciales si elle voulait qu'elles s'en sortent. Ses yeux se posèrent un instant sur Malou et elle croisa les doigts pour que ça ne soit qu'un malaise. Même si elles n'en avaient jamais parlé ouvertement, Maya n'était pas stupide, elle voyait bien la faiblesse de la jeune femme et les quantités infimes de nourriture qu'elle prenait à chaque repas. Elle était anorexique et son corps, soumis à la rudesse des températures de la nuit l'avait probablement abandonné. "Je vous ai dit tout ce que nous savions. Sauf qu'en effet, je ne pense pas que les intentions de ces militaires soient de vous arrêter pour vous inciter à rejoindre des groupes sous leurs emprises. Je pense qu'ils veulent vous tuer, comme ils nous tueront également, ça ne fait aucun doute. " Maya avait lâché ces dernières paroles d'un ton froid mais sincère. Elle ne savait rien de plus.

La jeune esclave posa son regard sur l'inconnue en face d'elle avant de se poser sur les personnes autour d'elles. Elle étudia les guenilles qui leur servaient de vêtements. "On dit souvent que les ennemies de mes ennemies sont mes amies. Nous avons un ennemi commun, ces hommes là dehors. Nous, comme vous, nous n'avons rien demandé. Ce n'est pas de nous dont vous devriez vous méfier, mais des militaires là dehors. Quel intérêt aurai-je eu à venir vous prévenir ?" Elle hésita et demanda sans grande conviction :"Êtes-vous bien armés ? Savez-vous vous battre ? Vous défendre ?" Son seul espoir était que derrière leurs guenilles et l'apparente précarité des lieux, ces personnes sachent se défendre et se débrouiller avec une arme, mais Maya en doutait. Un instant, elle songea à ceux qui étaient restés prisonniers des militaires mais Maya ne savait que faire pour eux. La priorité pour l'instant était de sauver ses fesses et celles de Malorie. Si Maya pouvait se mettre ces gens dans la poche, alors elles avaient peut être une chance de s'en sortir...

Dès le premier coup contre la porte, Anna se figea complètement. Cette journée ne faisait qu’empirer à chaque seconde et plus que jamais, son attention se fixait entièrement sur un seul but : fuir d’ici au plus vite. Elle se sentait vraiment désolée pour les autres membres de l’Arène, mais à quoi bon qu’ils meurent tous ici si deux au moins pouvaient survivre, pas vrai ? Malheureusement, elle n’était pas encore tout à fait sûre de comment s’y prendre pour convaincre son frère du jour. Et ils avaient visiblement un tout petit peu plus urgent à gérer pour le moment. Plus tendue que jamais, le regard fixé sur son compagnon d’infortune, Anna leva une main presque tremblante et posa un doigt devant ses lèvres pour faire comprendre à Isha qu’il devait rester très, très silencieux. À pas de loups, elle s’approcha juste assez pour le pousser doucement contre la paroie de la camionnette et lui fit signe de se tenir prêt. Après quoi, elle fit la chose probablement la plus stupide de toute cette journée. Mais vraiment, quel autre choix avait-elle ? S’ils attiraient l’attention de tous les militaires à la fois, elle ne sortirait jamais d’ici vivante. Tandis que là, elle avait une chance, même infime, de survivre encore quelques minutes, peut-être même assez longtemps pour convaincre ce crétin de démarrer la camionnette et filer d’ici. Aussi, elle s’approcha de la porte arrière et se pressa dans l’ombre, gardant l’arme dérobée au Sergent contre sa poitrine comme s’il s’agissait de la chose la plus précieuse au monde et releva les yeux vers Isha. “Je vais ouvrir.” souffla-t-elle aussi bas que possible. “Et refermer derrière lui quand il entrera. Attire son attention le temps que je nous en débarrasse, ok ?” Son regard resta fermement posé sur lui aussi longtemps que possible dans l’attente du moindre signe d’approbation - ou, plus certainement, de refus catégorique, connaissant un peu mieux l’animal. Elle ne voyait juste vraiment pas comment ils pourraient s’en sortir autrement et dans ses rêves les plus fous, ils pourraient au moins se débarrasser de chaque militaire un par un. Peut-être. Éventuellement ? Probablement pas.